Forme bidimensionnelle ou forme tridimensionnelle de la marque communautaire : un nouvel espoir pour les marque tridimensionnelles quand elles ne sont que des marques bidimensionnelles ! Les creux ne sont que des pois ( des points ?)

Avec la marque communautaire, la possibilité d’obtenir un enregistrement sur une forme est apparue très difficile, l’arrêt du 12 mai 2012 relance le débat.

5 novembre 1999 : dépôt  par la société Yoshida Metal Industry Co. Ltd, de la demande de marque communautaire :

anaphore trous ou points

Pour :

–        classe 8 : « Coutellerie, ciseaux, couteaux, fourchettes, cuillers, queux à faux, coffins, fusils à aiguiser, pinces pour arêtes de poisson » ;

–        classe 21 : « Ustensiles et récipients pour le ménage ou la cuisine (ni en métaux précieux, ni en plaqué), mélangeurs, spatules pour la cuisine, blocs à couteaux, pelles à tartes, pelles à gâteaux ».

14 septembre 2000 : l’examinateur rejette la demande d’enregistrement au motif que le signe en cause était dépourvu de tout caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 (devenu article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009).

31 octobre 2001 : la Chambre de recours infirme  la décision de l’examinateur

25 septembre 2002 : enregistrement de la marque sous le n° 1372580.

10 juillet 2007 : différentes sociétés, Pi-Design AG, Bodum France et Bodum Logistics A/S, déposent au titre de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 40/94 (devenu article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009), une demande en nullité de la marque communautaire au motif que cette marque « consistait en réalité en une forme nécessaire à l’obtention d’un résultat technique.  ….la marque contestée représente un ensemble de pois apparaissant sur les manches des couteaux. …….que ces pois constituaient de légers creux ayant pour fonction d’empêcher que le manche du couteau ne glisse. Pour étayer leurs arguments, les intervenantes se sont référées à deux brevets (US 6195899 et EP 1116507B1) détenus par la déposante.. »

15 juillet 2008 : la division d’annulation rejette la demande en nullité.

25 août 2008 : les sociétés demanderesses à l’annulation forment un recours auprès de l’OHMI.

20 mai 2010 : la première chambre de recours de l’OHMI a accueilli le recours en annulant la décision de la division d’annulation. :

–          tout d’abord, la marque contestée était une représentation bidimensionnelle des manches de couteaux pour lesquels l’enregistrement avait été sollicité. Elle a estimé, ….que  la jurisprudence développée au sujet des marques tridimensionnelles constituées par l’apparence du produit lui-même, vaut également pour les marques figuratives constituées par la représentation bidimensionnelle du produit.

–          Ensuite, la chambre de recours a considéré …..que le cadre entourant les points noirs représentait le contour du manche d’un couteau, que les pois noirs représentaient des creux, qui sont nécessaires à l’obtention d’un résultat technique, à savoir celui d’éviter que la main tenant le manche ne glisse accidentellement, et que le brevet américain de la requérante confirmait cette analyse.

Cette décision est soumise au Tribunal qui, le 8 mai 2012, l’annule.

Pour le tribunal, le débat porte sur trois questions :

–          « il s’agit de la question de savoir si l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 207/2009 est susceptible de s’appliquer à des signes bidimensionnels.

–          , il convient de vérifier si la chambre de recours pouvait analyser le signe déposé comme visant, en réalité, à protéger une forme tridimensionnelle, en considérant, par référence aux produits effectivement commercialisés par la requérante, que les pois du motif correspondaient à des creux.

–          en cas de réponse positive aux deux questions précédentes, se pose la question de savoir si la marque contestée est exclusivement constituée par la forme du produit nécessaire à l’obtention d’un résultat technique.

Des développements du jugement sont à retenir:

  • L’exclusion de l’article 7 s’applique aux marques bi ou tridimensionnelles

27      Eu égard au libellé de l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 207/2009 et à l’objectif d’intérêt général qu’il poursuit, il y a lieu de conclure qu’il s’applique à tout signe, bi- ou tridimensionnel, dès lors que toutes les caractéristiques essentielles du signe répondent à une fonction technique.

28      Il convient dès lors de rejeter les arguments de la requérante en ce qu’ils contestent la possibilité pour la chambre de recours d’appliquer l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 207/2009 à des marques figuratives bidimensionnelles.

  • Le motif principal pour l’annulation de la décision de la chambre de recours qui avait annulé la marque

Il convient de rappeler que la chambre de recours a considéré que l’ensemble des pois noirs de la marque contestée représentait, en réalité, des creux et constituait une structure antidérapante appliquée sur le manche d’un couteau.

30      À cet égard, il y a lieu de constater que le caractère creux des pois noirs ne fait pas partie de la marque contestée telle que déposée et enregistrée. En effet, rien dans la représentation graphique de la marque contestée ne suggère que les pois noirs en cause représentent des creux plutôt que des motifs figuratifs. De même, l’enregistrement de la marque contestée n’est assorti d’aucune description en ce sens. Pour conclure au caractère concave des pois, la chambre de recours ne s’est donc pas référée au signe déposé, mais à des représentations des produits effectivement commercialisés par la requérante.

31      Or, il ressort de la jurisprudence que seule la forme telle que reproduite dans la demande d’enregistrement doit faire l’objet de l’examen de la marque. En effet, la représentation graphique ayant pour fonction de définir la marque, elle doit être complète par elle-même, afin de déterminer, avec clarté et précision, l’objet exact de la protection conférée par la marque enregistrée à son titulaire (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 12 novembre 2008, Lego Juris/OHMI – Mega Brands (Brique de Lego rouge), T‑270/06, Rec. p. II‑3117, point 73, et la jurisprudence citée).

33      En outre, il ressort de l’article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009 que la nullité est déclarée « lorsque la marque communautaire a été enregistrée contrairement aux dispositions de l’article 7 ». Cette formulation implique que la disposition précitée s’applique aux marques qui étaient visées par l’article 7 du règlement n° 207/2009 au moment de leur dépôt. Par conséquent, l’examen d’une demande en nullité fondée sur ce dernier article doit également se situer au moment de ce dépôt, ce qui exclut la prise en compte de l’utilisation effective de la marque après son enregistrement.

34      Il s’ensuit que la constatation de la chambre de recours, au point 29 de la décision attaquée, selon laquelle « aucune disposition des règlements applicables n’interdit à l’OHMI de mettre en œuvre un type de ‘technique inverse’ consistant à rechercher ce que la marque représente véritablement », sur le fondement des éléments autres que la demande d’enregistrement concernée, est contraire à la réglementation applicable.

35      Partant, c’est à tort que la chambre de recours s’est écartée de la représentation graphique de la marque contestée lorsqu’elle s’est référée aux représentations des produits effectivement commercialisés par la requérante pour conclure au caractère concave des pois noirs figurant dans cette dernière marque.

36      Au vu de cette erreur de droit, il y a lieu d’accueillir le moyen unique et d’annuler, par conséquent, la décision attaquée, sans qu’il soit nécessaire d’examiner la troisième question, identifiée au point 21 ci-dessus, relative à la fonction technique prétendument remplie par la marque contestée.

37      À la lumière de ce qui précède, il convient d’annuler la décision attaquée.

 

 

 

 

 

 

Le 5 avril, la Cour de Cassation rappelle le point de départ sur Internet du délai de prescription en matière civile

Le 5 avril 2012, un troisième arrêt important est rendu par la Cour de Cassation : il rappelle le point de départ du délai de prescription en matière civile dans une affaire où l’article avait été mis en ligne sur Internet 13 ans auparavant.


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 8 juin 2011), que la société Nouvelle du Journal de l’Humanité (la société) a mis en ligne, au courant du mois d’août 1996, sur son site Internet des articles concernant l’état de santé de M. X… ; que, considérant que ces informations étaient constitutives d’une atteinte à sa vie privée au regard des articles 9 du code civil et 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, M. X… a fait assigner, par acte du 7 septembre 2009, la société devant un tribunal de grande instance en réparation du préjudice résultant de cette faute civile ;

Attendu que M. X… fait grief à l’arrêt de déclarer prescrite son action alors, selon le moyen, que le délai de prescription de l’action en responsabilité extracontractuelle court à compter du jour de la manifestation du dommage causé à la victime ou de la date à laquelle il a été révélé à cette dernière, si celle-ci n’en avait pas eu précédemment connaissance ; qu’en ayant décidé que le délai de prescription de l’action en responsabilité pour atteinte à la vie privée engagée par M. X… avait couru à compter de la mise en ligne sur l’Internet du texte litigieux au mois d’août 1996 et non à compter de la révélation du dommage à la victime au mois d’avril 2009, la cour d’appel a violé l’article 2270-1 ancien du code civil ;

Mais attendu que le délai de prescription de l’action en responsabilité civile extracontractuelle engagée à raison de la diffusion sur le réseau Internet d’un message, court à compter de sa première mise en ligne, date de la manifestation du dommage allégué ;

Et attendu que l’arrêt retient que le texte incriminé déjà publié sur le support papier le 14 janvier 1991 a été mis en ligne courant août 1996 ; qu’étant exclusif de toute confidentialité depuis cette époque, ce texte ne pouvait être considéré comme « étant clandestin » ; que c’est à partir de cette mise en ligne, équivalente à la mise à disposition du public, que le délai de prescription de dix ans devait être calculé et non à partir des seules constatations de M. X…, datant du 6 mai 2009, soit treize ans après la révélation au public du texte ;

Qu’en l’état de ces constatations et énonciations, la cour d’‘appel a exactement décidé que l’ action engagée par M. X… était prescrite ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X… aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze avril deux mille douze.

 

Mais la commercialisation de CD de chansons sur Internet fait l’objet de différentes questions préjudicielles

Mais la commercialisation de CD sur Internet fait l’objet d’un renvoi en questions préjudicielles par l’arrêt du 5 avril de la 1ère Chambre civile de la Cour de Cassation.

  • L’arrêt de la Cour d’Appel de Toulouse a déclaré incompétent le Tribunal de Toulouse, ville  du demandeur

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l’article 267 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Toulouse, 21 janvier 2009), que M. X…, prétendant être l’auteur, le compositeur et l’interprète de douze chansons enregistrées sur un disque vinyle et indiquant avoir découvert que celles-ci avaient été reproduites sans son autorisation sur un disque compact (CD) pressé en Autriche par la société autrichienne Kdg Mediatech AG, puis commercialisé par les sociétés britanniques Crusoe ou Elegy sur différents sites Internet accessibles depuis son domicile toulousain, a fait assigner le 12 octobre 2006 la société Kdg Mediatech AG devant le tribunal de grande instance de Toulouse aux fins d’obtenir réparation du préjudice subi du fait de la contrefaçon de ses droits d’auteur ; que la société défenderesse a soulevé l’incompétence des juridictions françaises ;

Attendu que M. X… fait grief à l’arrêt de déclarer le tribunal de grande instance de Toulouse incompétent pour connaître de ses demandes alors, selon le moyen, qu’en matière de contrefaçon, le demandeur peut saisir les tribunaux de l’Etat dans lequel le défendeur a son domicile ou le tribunal du lieu où le fait dommageable s’est produit ou risque de se produire, ce dernier lieu étant soit celui où l’auteur de la contrefaçon est établi, soit celui où l’objet de la contrefaçon se trouve diffusé ; qu’en relevant, pour juger que la contrefaçon invoquée par M. X… ne relevait pas de la compétence du tribunal de grande instance de Toulouse, qu’il était indifférent que les contrefaçons aient pu être achetées sur Internet en France et que cette juridiction était celle du domicile du demandeur, quand il était essentiel de déterminer, pour statuer sur la compétence des juridictions françaises, si les objets litigieux étaient diffusés sur un site Internet accessible en France et avaient pu être vendus dans ce pays, de sorte que le dommage était susceptible de s’y réaliser, voire s’y était d’ores et déjà réalisé, la cour d’appel a violé l’article 5, 3°, du règlement n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000, relatif à la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale ;

  • La Cour de Cassation se réfère aux dispositions du règlement 44/2001

Attendu que l’article 5, point 3, du règlement (CE) du Conseil n° 44/2001 du 22 décembre 2000 (Bruxelles I), concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, dispose qu’en matière délictuelle ou quasi-délictuelle, une personne domiciliée sur le territoire d’un Etat membre peut être attraite, dans un autre Etat membre, devant le tribunal du lieu où le fait dommageable s’est produit ou risque de se produire ;

 

  • Puis à la solution déjà connue de l’arrêt Fiona Shevill

Attendu que la Cour de justice des Communautés européennes a dit pour droit, dans l’arrêt Fiona Shevill c/ Press Alliance SA (7 mars 1995, C-68/93), que l’expression « lieu où le fait dommageable s’est produit » doit, en cas de diffamation au moyen d’un article de presse diffusé dans plusieurs États contractants, être interprétée en ce sens que la victime peut intenter contre l’éditeur une action en réparation soit devant les juridictions de l’État contractant du lieu d’établissement de l’éditeur de la publication diffamatoire, compétentes pour réparer l’intégralité des dommages résultant de la diffamation, soit devant les juridictions de chaque État contractant dans lequel la publication a été diffusée et où la victime prétend avoir subi une atteinte à sa réputation, compétentes pour connaître des seuls dommages causés dans l’État de la juridiction saisie ;

  • La solution en matière de marque est également rappelée

Attendu que, saisie notamment de la question de savoir si, pour que le titulaire d’une marque puisse s’opposer à l’offre à la vente, sur une place de marché en ligne, de produits de cette marque non auparavant commercialisés dans l’espace économique européen, il suffit que l’offre soit destinée à des consommateurs situés sur le territoire couvert par la marque, la Cour de justice de l’Union européenne (L’Oréal SA e. a. c/ eBay International e.a., 12 juillet 2011, C-324/09) a par ailleurs énoncé que « la simple accessibilité d’un site Internet sur le territoire couvert par la marque ne suffit pas pour conclure que les offres à la vente y affichées sont destinées à des consommateurs situés sur ce territoire », qu’ « en effet, si l’accessibilité, sur ledit territoire, d’une place de marché en ligne suffisait pour que les annonces y affichées relèvent du champ d’application de la directive 89/04 et du règlement n° 40/94, des sites et des annonces qui, tout en étant à l’évidence destinés exclusivement à des consommateurs situés dans les Etats tiers, sont néanmoins techniquement accessibles sur le territoire de l’Union seraient indûment soumis au droit de l’Union » (point 64) et qu' »il incombe, par conséquent, aux juridictions nationales d’apprécier au cas par cas s’il existe des indices pertinents pour conclure qu’une offre à la vente, affichée sur une place de marché en ligne accessible sur le territoire couvert par la marque, est destinée à des consommateurs situés sur celui-ci » (point 65), se référant expressément, par analogie, à son arrêt Pammer et Hotel Alpenhof (7 décembre 2010, C-585/08 et C-144/09) concernant l’interprétation de l’article 15, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 44/2001 relatif à la compétence en matière de contrats conclus par les consommateurs ;

  • De même pour l’atteinte aux droits de la personnalité

Attendu que la Cour de justice a enfin, dans l’arrêt eDate Advertising et Martinez (25 octobre 2011, C-509/09 et C-161/10), dit pour droit que l’article 5, point 3, du règlement (CE) n° 44/2001 doit être interprété en ce sens qu’en cas d’atteinte alléguée aux droits de la personnalité au moyen de contenus mis en ligne sur un site Internet, la personne qui s’estime lésée a la faculté de saisir d’une action en responsabilité, au titre de l’intégralité du dommage causé, soit les juridictions de l’Etat membre du lieu d’établissement de l’émetteur de ces contenus, soit les juridictions de l’Etat membre dans lequel se trouve le centre de ses intérêts, que cette personne peut également, en lieu et place d’une action en responsabilité au titre de l’intégralité du dommage causé, introduire son action devant les juridictions de chaque Etat membre sur le territoire duquel un contenu mis en ligne est accessible ou l’a été et que celles-ci sont compétentes pour connaître du seul dommage causé sur le territoire de l’Etat membre de la juridiction saisie ;

  • La situation se distingue encore des ventes sur les plates formes

Attendu que le présent litige présente la particularité de ne correspondre ni à l’hypothèse examinée dans l’arrêt L’Oréal SA e. a. c/ eBay International e.a. ni à celle analysée dans l’arrêt eDate Advertising et Martinez, dans la mesure où l’atteinte alléguée résulterait de l’offre en ligne d’un support matériel reproduisant illicitement l’oeuvre sur laquelle le demandeur à l’action revendique des droits d’auteur ;

  • D’où les questions préjudicielles

Attendu qu’il pose, dès lors, des questions d’interprétation du règlement (CE) n° 44/2001 du 22 décembre 2000, qui exigent de saisir la Cour de justice de l’Union européenne ;

PAR CES MOTIFS :

Renvoie à la Cour de justice de l’Union européenne aux fins de répondre aux questions suivantes :

1°) L’article 5, point 3, du règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil, du 22 décembre 2000, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution de décisions en matière civile et commerciale, doit-il être interprété en ce sens qu’en cas d’atteinte alléguée aux droits patrimoniaux d’auteur commise au moyen de contenus mis en ligne sur un site Internet,

– la personne qui s’estime lésée a la faculté d’introduire une action en responsabilité devant les juridictions de chaque Etat membre sur le territoire duquel un contenu mis en ligne est accessible ou l’a été, à l’effet d’obtenir réparation du seul dommage causé sur le territoire de l’Etat membre de la juridiction saisie,

ou

– il faut, en outre, que ces contenus soient ou aient été destinés au public situé sur le territoire de cet Etat membre, ou bien qu’un autre lien de rattachement soit caractérisé ?

2°) La question posée au 1°) doit-elle recevoir la même réponse lorsque l’atteinte alléguée aux droits patrimoniaux d’auteur résulte non pas de la mise en ligne d’un contenu dématérialisé, mais, comme en l’espèce, de l’offre en ligne d’un support matériel reproduisant ce contenu ?

Sursoit à statuer jusqu’à la décision de la Cour de justice de l’Union européenne ;

La loi sur la presse quand elle est appliquée à un article publié sur Internet, vient d’ échapper à une question prioritaire de constitutionnalité

La loi sur la presse quand elle est appliquée à un article publié sur Internet, vient d’ échapper par l’arrêt de la Cour de Cassation du 5 avril 2012 à une question prioritaire de constitutionnalité. C’est le premier des trois arrêts de la Cour de Cassation du 5 avril qui sont cités aujourd’hui sur ce blog.

Attendu que soutenant qu’un article publié sur le site internet www. artactif. com., appartenant à la société Art actif, contenait des imputations diffamatoires à l’égard tant du contenu que des auteur et éditeur d’un dictionnaire de cotation qu’elle publie chaque année, l’association Drouot cotation des artistes modernes et contemporains ainsi que M. X…et la société Renmax, respectivement auteur et éditeur du dictionnaire, ont assigné l’auteur prétendu de l’article, M. Y… et le directeur du site internet, M. Z…, en suppression de l’article et paiement de dommages-intérêts ; que cette action a été déclarée prescrite par arrêt de la cour d’appel d’Aix-en-Provence du 30 juin 2011 ;

Attendu qu’à l’occasion du pourvoi qu’elle a formé contre cette décision, l’association a demandé, par mémoire distinct et motivé, que soit posée au Conseil constitutionnel la question suivante :

« – l’article 65 alinéa 1er de la loi du 29 juillet 1881 est-il contraire à la Constitution en ce qu’instituant un délai de prescription après trois mois à compter du jour du dernier acte d’instruction ou de poursuite s’il en a été fait, il constitue une atteinte excessive au droit à un recours effectif ?

– l’article 65 alinéa 1er de la loi du 29 juillet 1881 est-il contraire à la Constitution en ce qu’il implique que l’acte interruptif de prescription ait été porté à la connaissance de la partie adverse dans le délai de prescription ? « 

Attendu que l’article 65, alinéa 1er, de la loi du 29 juillet 1881 est applicable au litige ;

Attendu que la disposition contestée n’a pas été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel ;

Attendu que la question posée ne porte pas sur l’interprétation d’une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n’aurait pas encore eu l’occasion de faire application ; qu’elle n’est donc pas nouvelle ;

Et attendu qu’elle ne peut être regardée comme sérieuse dès lors, d’abord, que le délai de prescription institué par l’article 65, alinéa 1er, de la loi du 29 juillet 1881 ne porte pas au droit à un recours effectif une atteinte excessive dans la mesure où il procède d’un juste équilibre entre le droit d’accès au juge et les exigences de conservation des preuves propres aux faits que réprime cette loi, ensuite, que dans les instances civiles en réparation des délits prévus par la loi du 29 juillet 1881, constitue un acte interruptif de la prescription tout acte régulier de procédure par lequel le demandeur manifeste son intention de continuer l’action engagée, même si cet acte n’est pas porté à la connaissance de la partie adverse elle-même ;

D’où il suit qu’il n’y a pas lieu d’en saisir le Conseil constitutionnel ;

PAR CES MOTIFS :

Dit n’y avoir lieu de saisir le Conseil constitutionnel de la question posée ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq avril deux mille douze.

Opposition à la demande d’enregistrement de la marque SWIFT GTI par la marque antérieure GTI, un signe utilisé de manière descriptive

L’arrêt rendu le 21 mars 2012 intervient dans une affaire où est opposée à la demande d’enregistrement de la marque SWIFT GTI  la marque antérieure GTI,  un signe qui apparaît utilisé de manière descriptive.

  • Les signes en cause

28 octobre 2003 : Suzuki Motor Corp dépose la demande de marque communautaire : SWIFT GTi

« Véhicules motorisés et leurs pièces et parties constitutives ; véhicules terrestres et leurs moteurs et autres pièces, parties constitutives et accessoires compris dans la classe 12 ; housses pour volants, pour sièges de véhicules et pour véhicules terrestres ; tapis et revêtements de plancher de véhicules automobiles terrestres ; pompes à pneus de véhicules ; pare-soleil, galeries, porte-bagages, porte-bicyclettes, porte-planches à voile, porte-skis et chaînes à neige, tous pour véhicules à moteur terrestres »

30 novembre 2004 : Volkswagen AG forme opposition sur la base de différentes marques verbales GTI :

–          enregistrement allemand n° 39 406 386, du 27 septembre 1995,

–          et l’enregistrement international n° 717592, du 22 juin 1999, en République tchèque, en Estonie, en Lettonie, en Lituanie, en Pologne, en Slovénie, en Slovaquie, en Espagne, au Portugal, au Benelux, en France, en Italie, en Autriche et en Suède.

Les deux enregistrements visent  « automobiles et leurs pièces ; moteurs automobiles »,

  • Une succession d’événements

21 mars 2005 : l’OHMI demande à Volkswagen AG des preuves d’usage de ses deux enregistrements  au plus tard le 27 mai 2005

25 mai 2005 : Volkswagen AG présente des documents mais Suzuki en conteste la pertinence

14 septembre 2005 : Suzuki demande à l’OHMI de rectifier la représentation de la marque demandée, si la demande porte sur « SWIFT GTi » avec la lettre « i » finale minuscule, sa publication a été faite sous la forme « SWIFT GTI ».

10 novembre 2005 : l’OHMI indique aux parties :

–          qu’une nouvelle publication de la marque va intervenir

–          la suspension de la procédure d’opposition jusqu’à l’expiration du nouveau délai d’opposition commençant à courir à la date de la nouvelle publication

30 janvier 2006 : nouvelle publication. Aucune nouvelle opposition n’a été déposée.

14 mars 2006 : la procédure d’opposition reprend . A cette date le délai d’opposition sur la nouvelle publication n’a pas expiré.

27 mars 2007 : la division d’opposition rejette l’opposition pour insuffisance de preuve de l’usage sérieux des marques antérieures

14 mai 2007 : recours de Volkswagen contre la décision de la division d’opposition.

9 décembre 2008 : la deuxième chambre de recours de l’OHMI rejette le recours.

Au-delà des débats sur la détermination des  marques nationales soumises à l’obligation de l’usage, la chambre de recours a considéré que : « les marques antérieures seraient perçues – au moins intuitivement – comme faisant référence à certaines caractéristiques techniques d’une voiture ou de son moteur, alors que la marque demandée consisterait en une combinaison d’un nom fantaisiste de modèle de véhicule, « swift », suivi d’une référence auxdites caractéristiques techniques »

D’où le recours de Volkswagen devant le Tribunal de l’Union Européenne.

Le tribunal va rejeter le recours

  • Sur le public pertinent

S’agissant du degré d’attention et de connaissances du public pertinent, la chambre de recours a constaté, au point 67 de la décision attaquée, que, alors même que l’on ne saurait attendre d’un consommateur moyen un niveau de connaissances et d’attention comparable à celui d’un professionnel du secteur automobile, il convenait néanmoins de présumer que son niveau d’attention à l’égard des produits en cause était supérieur à la moyenne, étant donné que l’achat d’une voiture était l’un des investissements les plus importants que devait normalement faire un consommateur moyen, tandis que l’équipement, les pièces constitutives et les accessoires de voitures étaient des produits relativement onéreux, qui ne faisaient certainement pas partie des achats quotidiens et requéraient une plus grande attention quant à leur compatibilité. De la même manière, au point 52 de la décision attaquée, la chambre de recours s’est référée à des consommateurs particulièrement intéressés par les voitures en général ou ponctuellement, par exemple lors du choix d’une voiture. Ceux-ci seraient raisonnablement attentifs et avisés, notamment dans la mesure où ils seraient amenés à investir une somme considérable dans l’achat d’une « voiture ‘GTI’ »

  • Sur les signes en cause

Ainsi, en premier lieu, au point 51 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que, compte tenu de nombreuses preuves tirées de dictionnaires fournies par Suzuki, il ne faisait aucun doute que la combinaison de lettres « gt », et sa variante « gti », étaient des sigles notoirement connus parmi les professionnels du secteur automobile, puisqu’il s’agissait des lettres initiales de « gran turismo », ou de « grand tourisme », et de « gran turismo iniezione », ou de « grand tourisme injection ». Il convient également de relever que, au point 22 de la décision attaquée, sous iv) à xiv), la chambre de recours avait référencé les divers renvois, présentés par Suzuki, aux extraits des dictionnaires portant sur les significations du sigle GTI.

52      Au point 51 de la décision attaquée, la chambre de recours s’est encore référée, à cet égard, aux règlements de la Fédération internationale de l’automobile (ci-après la « FIA »), définissant, en outre, un véhicule GT comme une « automobile ouverte ou fermée disposant au plus d’une porte de chaque côté et au moins de deux sièges situés de part et d’autre de la ligne centrale longitudinale de la voiture […] », qui doit « pouvoir être utilisée sur route de façon tout à fait légale et être adaptée à la course sur circuits ou en intérieur ».

53      Selon la chambre de recours, le sigle GTI présente, dès lors, un caractère descriptif.

  • Et en particulier en Suède, territoire où la marque antérieure a été retenue

En effet, comme cela ressort des points 51 à 54 de la décision attaquée, la chambre de recours s’est notamment référée au règlement de la FIA, dont il n’a pas été soutenu qu’elle n’était pas active en Suède, ensuite au site Internet d’un concessionnaire suédois de voitures, Passagen bilweb, cité d’ailleurs à deux reprises, ainsi qu’à l’encyclopédie nationale suédoise Nationalencyklopedin, et enfin à son « expérience générale » portant sur l’utilisation des combinaisons de lettres se terminant par la lettre « i » sur des véhicules, sans limiter territorialement la validité de cette dernière considération.

  • A noter également

il convient de relever que, dans la mesure où les éléments présentés par la chambre de recours dans la décision attaquée démontrent, concomitamment, l’enregistrement et l’utilisation d’autres marques détenues par d’autres entreprises et comportant le sigle GTI, l’allégation susvisée de la requérante pourrait, tout au plus, indiquer une éventuelle coexistence entre de telles marques et ses propres marques sur les marchés en cause.