La compétence exclusive de l’INPI tant que les mêmes demandes ne sont pas présentées par les mêmes parties devant le Tribunal dans l’instance en contrefaçon

 L’Ordonnance du 13 novembre relative aux marques prévoit au nouvel article L716-5 une répartition des compétences entre l’INPI et les tribunaux de grande instance pour les actions en nullité et en déchéance des marques.  Limitons-nous aux premières.

 l’INPI se voit reconnaître une compétence exclusive pour l’action en nullité des marques françaises  au regard de certains droits antérieurs par différents renvois aux dispositions du Code de la propriété intellectuelle

 Art. L. 716-5 . Ne peuvent être formées que devant l’Institut national de la propriété industrielle :

1_ Les demandes en nullité exclusivement fondées sur un ou plusieurs des motifs énumérés à l’article L. 711-2, aux 1_ à 5_, 9_ et 10_ du I de l’article L. 711-3, au III du même article ainsi qu’aux articles L. 715-4 et L. 715-9 ;

C’est-à-dire :

Art. L. 711-2

1_ Un signe qui ne peut constituer une marque au sens de l’article L. 711-1 ;

2_ Une marque dépourvue de caractère distinctif ;

3_ Une marque composée exclusivement d’éléments ou d’indications pouvant servir à désigner, dans le commerce, une caractéristique du produit ou du service, et notamment l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique, l’époque de la production du bien ou de la prestation du service ;

4_ Une marque composée exclusivement d’éléments ou d’indications devenus usuels dans le langage courant ou dans les habitudes loyales et constantes du commerce ;

5_ Un signe constitué exclusivement par la forme ou une autre caractéristique du produit imposée par la nature même de ce produit, nécessaire à l’obtention d’un résultat technique ou qui confère à ce produit une valeur substantielle ;

6_ Une marque exclue de l’enregistrement en application de l’article 6 ter de la convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle à défaut d’autorisation des autorités compétentes ;

7_ Une marque contraire à l’ordre public ou dont l’usage est légalement interdit ;

8_ Une marque de nature à tromper le public, notamment sur la nature, la qualité ou la provenance géographique du produit ou du service ;

9_ Une marque exclue de l’enregistrement en vertu de la législation nationale, du droit de l’Union européenne ou d’accords internationaux auxquels la France ou l’Union sont parties, qui prévoient la protection des appellations d’origine et des indications géographiques, des mentions traditionnelles pour les vins et des spécialités traditionnelles garanties ;

10_ Une marque consistant en la dénomination d’une variété végétale antérieure, enregistrée conformément au livre VI du présent code, au droit de l’Union européenne ou aux accords internationaux auxquels la France ou l’Union sont parties, qui prévoient la protection des obtentions végétales, ou la reproduisant dans ses éléments essentiels, et qui porte sur des variétés végétales de la même espèce ou d’une espèce étroitement liée ;

11_ Une marque dont le dépôt a été effectué de mauvaise foi par le demandeur.

Art. L. 711-3

1_ Une marque antérieure :

  1. a) Lorsqu’elle est identique à la marque antérieure et que les produits ou les servicesqu’elle désigne sont identiques à ceux pour lesquels la marque antérieure est protégée ;
  1. b) Lorsqu’elle est identique ou similaire à la marque antérieure et que les produits ou lesservices qu’elle désigne sont identiques ou similaires à ceux pour lesquels la marque antérieure est protégée, s’il existe, dans l’esprit du public, un risque de confusion incluant le risque d’association avec la marque antérieure ;

2_ Une marque antérieure enregistrée ou une demande de marque sous réserve de son enregistrement ultérieur, jouissant d’une renommée en France ou, dans le cas d’une marque de l’Union européenne, d’une renommée dans l’Union, lorsque la marque postérieure est identique ou similaire à la marque antérieure, que les produits ou les services qu’elle désigne soient ou non identiques ou similaires à ceux pour lesquels la marque antérieure est enregistrée ou demandée et lorsque l’usage de cette marque postérieure sans juste motif tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure, ou qu’il leur porterait préjudice ;

3_ Une dénomination ou une raison sociale, s’il existe un risque de confusion dans l’esprit du public ;

4_ Un nom commercial, une enseigne ou un nom de domaine, dont la portée n’est pas seulement locale, s’il existe un risque de confusion dans l’esprit du public ;

5_ Une indication géographique enregistrée mentionnée à l’article L. 722-1 ou une demande d’indication géographique sous réserve de l’homologation de son cahier des charges et de son enregistrement ultérieur ;

9_ Le nom, l’image ou la renommée d’une collectivité territoriale ou d’un établissement public de coopération intercommunale ;

10_ Le nom d’une entité publique, s’il existe un risque de confusion dans l’esprit du public.

III. Ne peut être valablement enregistrée et, si elle est enregistrée, est susceptible d’être déclarée nulle une marque dont l’enregistrement a été demandé par l’agent ou le représentant du titulaire d’une marque protégée dans un Etat partie à la convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle, en son propre nom et sans l’autorisation du titulaire à moins que cet agent ou ce représentant ne justifie sa démarche.

Art. L. 715-4

Outre les motifs de rejet ou de nullité prévus respectivement aux articles L. 712-7 et L. 714-3, une marque de garantie est refusée à l’enregistrement ou, si elle enregistrée, est susceptible d’être déclarée nulle lorsqu’elle ne respecte pas les dispositions des articles L. 715-1 à L. 715-3 ou que son règlement d’usage est contraire à l’ordre public.

Une marque de garantie est également refusée à l’enregistrement ou, si elle est enregistrée, est susceptible d’être déclarée nulle lorsqu’elle risque d’induire le public en erreur sur son caractère ou sa signification, notamment lorsqu’elle est susceptible de ne pas apparaître comme une marque de garantie.

Art. L. 715-9

 Outre les motifs de rejet ou de nullité prévus respectivement aux articles L. 712-7 et L. 714-3, une marque collective est refusée à l’enregistrement ou, si elle est enregistrée, est susceptible d’être déclarée nulle lorsqu’elle ne respecte pas les dispositions des articles L. 715-6 à L. 715-8 ou que son règlement d’usage est contraire à l’ordre public.

Une marque collective est également rejetée ou, si elle enregistrée, est susceptible d’être déclarée nulle lorsqu’elle risque d’induire le public en erreur sur son caractère ou sa signification, notamment lorsqu’elle est susceptible de ne pas apparaître comme une marque collective.

Mais cette compétence exclusive est tempérée par l’exclusivité des Tribunaux de grande instance

  • En cas d’action en contrefaçon ou d’action en concurrence déloyale;

1_ Lorsque les demandes mentionnées aux 1_ et 2_ du I sont formées à titre principal ou reconventionnel par les parties de façon connexe à toute autre demande relevant de la compétence du tribunal et notamment à l’occasion d’une action introduite sur le fondement des articles L. 716-4, L. 716-4-6, L. 716-4-7 et L. 716-4-9 ou à l’occasion d’une action en concurrence déloyale ;

  • En cas d’exécution des actions visant à faire cesser l’atteinte à la marque avant l’engagement de l’action en contrefaçon

2_ Lorsque les demandes mentionnées aux 1_ et 2_ du I sont formées alors que, soit des mesures probatoires, soit des mesures provisoires ou conservatoires ordonnées afin de faire cesser une atteinte à un droit de marque, sont en cours d’exécution avant l’engagement d’une action au fond.

Tant que le Brexit n’est pas intervenu, les britanniques bénéficient pleinement du système de la marque de l’Union

Le 29 novembre 2018, la Cour de justice a refusé tout effet par anticipation au Brexit, et cet arrêt est intervenu en matière de marque.
Très brièvement la chronologie à l’arrêt du 29 novembre 2018, l’arrêt est là

28 janvier 2010 : enregistrement de la marque de l’Union  ALCOLOCK pour des produits et services des classes 9, 37 et 42.

13 août 2012 : Lion Laboratorie, société britannique,  demande la nullité de cet enregistrement en invoquant la marque verbale antérieure ALCOLOCK, enregistrée au Royaume-Uni depuis le 16 août 1996 pour désigner « [a]ppareils pour tester, mesurer, indiquer, enregistrer et/ou analyser l’alcool dans l’air expiré ; appareils de contrôle des appareils précités ou réagissant aux appareils précités ; pièces et parties constitutives de ces appareils », de la classe 9.

22 novembre 2012 : Alcohol Countermeasure Systems, société canadienne, le titulaire de la marque de l’union,  demande des preuves d’usages de la marque britannique .

24 mars 2014 : la division d’annulation annule la marque de l’union. L’usage de la marque britannique étant retenu comme sérieux.

11 août 2015 : rejet par la Chambre de recours de l’EUIPO du recours présenté par le titulaire de la marque de l’Union.

29 mars 2017 : rejet du recours par le Tribunal de l’Union.

29 novembre 2018 : la Cour de Justice de l’Union rejette le pourvoi contre l’arrêt du Tribunal.

Parmi les différents moyens présentés à la Cour, l’examen du 5ème retient plus particulièrement l’attention. Pour la société titulaire de la marque de l’Union, la marque antérieure étant une marque britannique, le Tribunal aurait dû reporter sa décision après le 29 mars 2019, date de la sortie de l’Union.

La Cour refuse cette analyse.

Tant que le Brexit n’est pas intervenu, le Royaume-Uni et ses ressortissants bénéficient pleinement des droits de l’Union

108    En substance, elle [ la requérante, le titulaire de la marque de l’Union] estime que, à compter du 23 juin 2016, date du référendum à l’occasion duquel le peuple du Royaume-Uni a exprimé sa volonté de se retirer de l’Union, le Tribunal aurait dû, au nom de l’ordre public, tenir compte du futur retrait du Royaume-Uni de l’Union ou ordonner une suspension de la procédure jusqu’au retrait effectif de celui-ci, afin d’annuler, ensuite, la décision litigieuse. Elle observe que le Tribunal a prononcé l’arrêt attaqué le jour où le Royaume-Uni a notifié son intention de se retirer de l’Union, conformément à l’article 50 TUE.

109    Ce faisant, le gouvernement du Royaume-Uni aurait reconnu que les marques du Royaume-Uni ne sauraient servir de fondement aux fins de l’annulation de marques de l’Union européenne.

110    La requérante ajoute, d’une part, que le fait que la décision litigieuse a été adoptée avant ladite notification et que le droit de l’Union continue à s’appliquer au Royaume-Uni pendant le déroulement de la procédure visée à l’article 50 TUE ne saurait s’opposer à la recevabilité ainsi qu’au bien-fondé du présent moyen. En effet, ce moyen soulèverait des questions d’ordre public. De surcroît, la requérante n’aurait pu avancer ledit moyen devant le Tribunal, dès lors que le référendum a été organisé après la clôture, le 11 février 2016, de la procédure écrite devant celui-ci.

111    D’autre part, la requérante estime qu’il ne lui suffirait pas de déposer une nouvelle marque de l’Union européenne portant sur le signe « alcolock » au terme de la procédure visée à l’article 50 TUE. En effet, elle ne serait plus en mesure de réclamer, à ce moment-là, le plein bénéfice de ses droits d’ancienneté. De surcroît, la transformation de la marque contestée en marques nationales, en attendant le retrait du Royaume-Uni de l’Union, l’exposerait à des coûts inutiles et disproportionnés.

112    La requérante fait par ailleurs observer que, compte tenu de l’article 64, paragraphe 3, du règlement no 207/2009, c’est la date à laquelle sera rendu l’arrêt de la Cour sur pourvoi qui importe.

113    L’EUIPO estime que ce moyen est dénué de tout fondement.

114    Le Royaume-Uni estime que le présent moyen est irrecevable et, en tout état de cause, non fondé.

 Appréciation de la Cour

115    Par son cinquième moyen, la requérante allègue, en substance, que le Tribunal aurait dû suspendre la procédure jusqu’à la date du retrait du Royaume-Uni de l’Union, afin de pouvoir annuler la décision litigieuse au motif qu’une marque antérieure du Royaume-Uni ne pourrait plus être opposée au maintien d’une marque de l’Union européenne.

116    Sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité d’un tel moyen, il convient de relever que, aux termes de l’article 65, paragraphe 2, du règlement no 207/2009, le Tribunal ne peut annuler ou réformer la décision d’une chambre de recours de l’EUIPO que « pour incompétence, violation des formes substantielles, violation du traité, [dudit] règlement ou de toute règle de droit relative à leur application, ou détournement de pouvoir ». Il s’ensuit que le Tribunal ne peut annuler ou réformer la décision litigieuse que si, à la date à laquelle cette décision a été prise, elle était entachée d’un motif d’annulation ou de réformation. En revanche, le Tribunal ne saurait annuler ou réformer ladite décision pour des motifs qui apparaîtraient postérieurement à son prononcé

117    Or, il serait contraire à cette jurisprudence de considérer que le Tribunal était en l’espèce tenu de suspendre la procédure pendante devant lui afin, le cas échéant, d’annuler la décision litigieuse à la suite du retrait du Royaume-Uni de l’Union au motif, par ailleurs purement hypothétique à ce stade, que ledit retrait affecterait rétroactivement l’issue des procédures en nullité fondées sur une marque antérieure de cet État membre.

118    Par ailleurs, dans la mesure où la requérante soutient que Lion Laboratories est désormais une société établie en dehors de l’Union et que cette société a obtenu l’annulation de la marque contestée sur la base de la marque antérieure enregistrée hors de l’Union, il convient de relever que la seule notification par un État membre de son intention de se retirer de l’Union conformément à l’article 50 TUE n’a pas pour effet de suspendre l’application du droit de l’Union dans cet État membre et que, par conséquent, ce droit reste pleinement en vigueur dans ledit État membre jusqu’à son retrait effectif de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 19 septembre 2018, RO, C‑327/18 PPU, EU:C:2018:733, point 45).

119    Il s’ensuit que le cinquième moyen et, par conséquent, le quatrième chef des conclusions de la requérante doivent être écartés.

120    Aucun des moyens soulevés par la requérante à l’appui de son pourvoi n’ayant été accueilli, il y a lieu de rejeter ce pourvoi dans son intégralité.

Autrement dit tant que le Brexit n’est pas intervenu, les ressortissants du Royaume-Uni bénéficient pleinement des droits de l’Union y compris des règles applicables aux marques de l’Union

 

L’examen approfondi par l’Office des caractéristiques techniques du signe

Le 31 janvier 2018, le Tribunal rejette le recours contre la Chambre de l’Office qui a annulé une marque portant sur une forme technique. L’arrêt est là.

Le signe de la marque enregistrée puis annulée : Les produits visés à cet enregistrement : « Produits pharmaceutiques pour traitement de la démence du type Alzheimer »

Des différents moyens invoqués par la société titulaire de cet enregistrement, qui pourtant ne permettront pas d’annuler la décision,  retenons, ici, celui des éléments techniques que l’Office peut examiner;

Pour le titulaire de la marque, rien sur le signe tel que déposé ne permet de distinguer cel ui est le timbre de la pellicule protectrice

59.La requérante affirme que l’analyse, par la chambre de recours, de la prétendue fonction technique de la forme carrée de la pellicule protectrice est erronée. Elle invoque quatre arguments à l’appui de cette affirmation. En premier lieu, l’enregistrement, à lui seul, ne permettrait pas de déterminer laquelle des deux parties correspond au timbre ou à la pellicule protectrice. En deuxième lieu, l’affirmation de la chambre de recours selon laquelle la forme carrée présente un avantage d’emballage et de stockage du produit fini ne serait étayée par aucun élément. En troisième lieu, en ce qui concerne l’affirmation de la chambre de recours selon laquelle la forme carrée présente une utilité supplémentaire en ce que les coins permettent de décoller et de détacher le timbre plus facilement que, par exemple, s’il avait une forme circulaire, aucun élément ne permettrait de parvenir à la conclusion selon laquelle la forme carrée présenterait plus d’avantages que d’autres formes. En quatrième lieu, la chambre de recours se serait contredite elle-même en prenant en considération le fait que les pellicules protectrices superposées en plastique étaient destinées à permettre au consommateur de retirer le timbre plus facilement, alors que la forme carrée n’était pas nécessaire à l’obtention de ce résultat technique.

..

Pour le titulaire de la marque, rien sur le signe tel que déposé ne permet de distinguer ce qui est le timbre de la pellicule protectrice.

61      Tout d’abord, en ce qui concerne l’argument de la requérante selon lequel l’enregistrement, à lui seul, ne permet pas de déterminer laquelle des deux parties correspond au timbre ou à la pellicule protectrice, il convient de constater que l’autorité compétente peut effectuer un examen approfondi dans le cadre duquel sont pris en compte, outre la représentation graphique et les éventuelles descriptions déposées lors du dépôt de la demande d’enregistrement, des éléments utiles à l’identification convenable des caractéristiques essentielles d’un signe et de leur fonction technique, y compris les éléments supplémentaires ayant trait à la fonction du produit concret en cause (voir, en ce sens, arrêts du 6 mars 2014, Pi-Design e.a./Yoshida Metal Industry, C‑337/12 P à C‑340/12 P, non publié, EU:C:2014:129, points 54 et 55, et du 10 novembre 2016, Simba Toys/EUIPO, C‑30/15 P, EU:C:2016:849, points 48 à 52).

62      D’abord, il ressort de ce qui précède que, en tenant compte, notamment, de la fonction du produit concret en cause pour déterminer quelle partie de la forme correspondait au timbre et quelle partie correspondait à la pellicule protectrice, la chambre de recours a effectué l’examen approfondi requis par la jurisprudence.

L’Office peut se référer aux pratiques techniques générales du secteur

63      Ensuite, il convient de constater que c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré que la forme carrée de la pellicule avait une fonction technique, dans la mesure où elle facilite l’emballage et le stockage des timbres transdermiques, qui sont emballés dans des pochettes, lesquelles, à leur tour, sont stockées dans des boites en carton rectangulaires. Cette conclusion se justifie par le fait que, en premier lieu, les boites en carton rectangulaires sont les types d’emballage et de stockage les plus utilisés dans le domaine médical et, en second lieu, les pellicules de forme rectangulaire sont courantes parmi les exemples de timbres présentés à l’EUIPO par la requérante. En outre, la requérante n’a pas fourni d’éléments de nature à infirmer cette conclusion.

64      Enfin, s’agissant de l’allégation de la requérante selon laquelle la chambre de recours se contredit lorsqu’elle affirme que tant les pellicules protectrices superposées en plastique que la forme carrée sont destinées à permettre au consommateur de retirer le timbre plus facilement, il convient de constater que, même si elle était fondée, cela serait sans incidence sur la légalité de la décision attaquée dès lors que le prétendu décollement plus facile n’était qu’une fonctionnalité supplémentaire de la forme carrée du timbre identifiée par la chambre de recours.

65      Dès lors, il convient de rejeter cette première sous-branche comme étant non fondée.

 

Comment invoquer des droits nationaux pour les opposer à une marque communautaire et en demander la nullité ?

Différentes situations peuvent conduire à l’annulation d’une marque communautaire.

S’agissant des droits nationaux antérieurs susceptibles d’être opposés à une marque communautaire pour en demander l’annulation, – antériorités prévues à l’article 8 du règlement (CE) no 207/2009 à combiner avec la règle n° 37 du règlement (CE) n° 2868/95 -, qui de l’Office ou du demandeur ( son avocat) doit apporter la preuve de leur contenu et de leur reconnaissance dans tel ou tel pays ?

C’est l’ordonnance du 31 janvier 2016 de la Cour de Justice, l’affaire C‑485/16 P, qui répond sur un pourvoi formé contre un arrêt du Tribunal. La décision

Notons la célérité, le pourvoi est du 7 septembre 2016 !

L’affaire est assez simple, la demande en nullité a été rejetée par la division d’annulation de l’EUIPO, par la Chambre de recours puis par le Tribunal car le demandeur à l’annulation de la marque communautaire s’est contenté d’indiquer  qu’il disposait dans différents pays d’une marque d’usage et s’est référé de manière générale aux législations nationales énumérées à titre purement informatif dans le tableau compris dans des directives de l’EUIPO.

 Cette référence générale n’est pas suffisante, il est donc nécessaire pour le requérant à l’annulation de déterminer et d’expliciter les législations nationales qu’il invoque même si celles-ci à priori pouvaient être connues de l’office. (Et bien entendu de montrer que sa situation lui permet d’en bénéficier).

La motivation de la Cour pour rejeter ce pourvoi

19      Par son premier moyen, la requérante fait valoir que le Tribunal a méconnu l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009 et la règle 37, sous b), ii), du règlement no 2868/95, dans la mesure où il a considéré qu’Universal Protein Supplements n’avait identifié ni les États membres pertinents dont elle invoquait le droit national, ni de manière suffisamment détaillée le contenu des dispositions nationales pertinentes, ni, enfin, le régime de celles-ci conduisant à l’interdiction des marques de l’Union postérieures à la marque non enregistrée de la requérante. Plus particulièrement, Universal Protein Supplements reproche au Tribunal d’avoir jugé à tort, aux points 30 et 31 de l’arrêt attaqué, que les détails contenus dans le tableau intitulé « Droits nationaux constituant des “droits antérieurs” en vertu de l’article 8, paragraphe 4, du [règlement no 207/2009] » annexé aux directives de l’EUIPO n’étaient pas suffisants et que ce tableau ne contenait pas de citations des dispositions des réglementations nationales s’y trouvant mentionnées.

20      Par son troisième moyen, la partie requérante soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit en conditionnant, au point 48 de l’arrêt attaqué, le devoir de vérification incombant à l’EUIPO à la fourniture préalable par le demandeur en nullité des précisions nécessaires relatives aux droits nationaux applicables.

….

22      En l’occurrence, il convient de constater que le Tribunal a considéré que la requérante n’avait satisfait à aucune des deux exigences cumulatives posées à la règle 37, sous b), ii), du règlement no 2868/95. Il a ainsi exposé, aux points 30 à 34 de l’arrêt attaqué, que la requérante n’avait pas apporté d’éléments établissant le contenu des législations nationales qu’elle avait invoquées. De manière déterminante, il a également estimé, aux points 35 à 38 de cet arrêt, que la requérante n’avait pas fourni d’éléments démontrant qu’elle remplissait les conditions requises, conformément à ces législations nationales, afin de pouvoir faire interdire l’usage d’une marque de l’Union européenne en vertu d’un droit antérieur.

23      Dans ces circonstances, même à supposer que le Tribunal ait considéré de manière erronée que la requérante n’avait pas apporté d’éléments établissant le contenu des droits nationaux invoqués, ou que le devoir, incombant à l’EUIPO, de vérifier la pertinence des éléments de preuve produits par l’auteur d’une demande en nullité ne trouve à s’appliquer que si ce dernier a fourni les précisions nécessaires concernant les droits nationaux applicables, de telles erreurs sont sans incidence sur le dispositif de l’arrêt attaqué, dès lors que l’appréciation figurant aux points 35 à 38 dudit arrêt suffit à le justifier.

24      Dès lors, quand bien même les présents moyens s’avéraient fondés, ils ne seraient pas de nature à entraîner l’annulation de l’arrêt attaqué.

25      Par voie de conséquence, il y a lieu d’écarter les premier et troisième moyens comme étant inopérants.

Nullité d’une décision de la Chambre de recours de l’OHMI pour défaut de motivation relevé d’office

Le contentieux de l’annulation de la marque communautaire peut être engagé devant un tribunal de grande instance ou devant l’OHMI. L’OHMI, ses divisions d’opposition et ses chambres de recours appliquent des règles spécifiques de procédures  sous le contrôle du Tribunal et de la Cour de justice.

L’ arrêt du 28 janvier 2016 du Tribunal montre la grande vigilance de cette juridiction qui se saisit d’office. Cette « auto-saisine » est d’autant plus remarquable qu’elle va même à l’encontre d’un des motifs invoqués par le requérant à l’annulation de la décision de la Chambre de recours, décision qui sera donc annulée mais pour un autre motif celui de l’absence de motivation suffisante. L’ arrêt est là.

  • Le rappel du principe de motivation

52 ….. il doit être rappelé que, conformément à l’article 75 du règlement n° 207/2009, les décisions de l’OHMI doivent être motivées. Cette obligation de motivation, découlant aussi de l’article 296 TFUE, a fait l’objet d’une jurisprudence constante selon laquelle la motivation doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’auteur de l’acte, de manière à permettre, d’une part, aux intéressés un exercice effectif de leur droit à demander un contrôle juridictionnel de la décision attaquée et, d’autre part, au juge de l’Union d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision

53 Par ailleurs, la constatation d’un défaut ou d’une insuffisance de motivation relève de la violation des formes substantielles, au sens de l’article 263 TFUE, et constitue un moyen d’ordre public qui doit être soulevé d’office par le juge de l’Union

54 À cet égard, il convient de rappeler que l’obligation, pour le juge de l’Union, de relever d’office un moyen d’ordre public doit être exercée à la lumière du principe du contradictoire. Il est de jurisprudence constante que, hors les cas particuliers tels que, notamment, ceux prévus par les règlements de procédure des juridictions de l’Union, le juge de l’Union ne peut fonder sa décision sur un moyen de droit relevé d’office, fût-il d’ordre public, sans avoir invité au préalable les parties à présenter leurs observations sur ledit

  • ici le contrôle du principe de motivation s’applique à une affaire complexe où la marque communautaire dont l’annulation est demandée, porte sur un nom patronymique dont le titulaire est une société qui porte ce même nom comme dénomination sociale car créée historiquement par une société issue d’une société familiale identifiée sous ce même nom et … dont un descendant est le requérant à l’annulation …

…..afin de déterminer à quoi la chambre de recours s’est référée en mentionnant le « nom ‘Gugler’ » et sur quels éléments elle a fondé son raisonnement (point 30 de la décision attaquée), il n’est possible que d’émettre des hypothèses.

84 En second lieu, il doit être remarqué que la chambre de recours a écarté les faits repris au point 30 de la décision attaquée, lesquels correspondaient aux arguments avancés par la requérante, résumés au point 7 de la décision attaquée, en se contentant de les mentionner et d’indiquer que lesdits arguments n’altéraient pas sa conclusion. Elle n’a fourni aucune explication quant aux motifs pour lesquels ces arguments ne modifiaient pas sa conclusion, que ce soit explicitement ou implicitement, dans la mesure où il ne ressort pas de ladite décision que les arguments en question ont été examinés dans une quelconque partie de cette décision.

85 Partant, aux fins de répondre à l’argumentation de la requérante selon laquelle la chambre de recours a considéré à tort que les faits mentionnés au point 30 de la décision attaquée n’altéraient pas sa conclusion, alors que, au contraire, ils auraient témoigné de la mauvaise foi de Gugler GmbH lors du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée, il n’est possible que d’émettre des hypothèses quant au raisonnement tenu par la chambre de recours.

86 Dans ces circonstances, conformément à la jurisprudence citée aux points 52 à 54 ci-dessus, le Tribunal a décidé d’examiner d’office le respect, par la chambre de recours, de son obligation de motivation et il a invité les parties, dans le cadre d’une mesure d’organisation de la procédure prévue à l’article 89 du règlement de procédure, à s’exprimer sur cette question lors de l’audience. En particulier, les parties ont été invitées à indiquer si elles estimaient que la décision attaquée permettait de déterminer les raisons pour lesquelles la chambre de recours avait rejeté les arguments invoqués par la requérante au soutien de sa demande en nullité fondée sur l’article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, ces arguments étant mentionnés au point 7 de la décision attaquée et repris au point 30 de celle-ci.

87 Lors de l’audience, l’OHMI a soutenu qu’il devait être considéré que la chambre de recours avait accordé une importance décisive au fait que Gugler GmbH utilisait le « signe Gugler’ » depuis de nombreuses années.
88 Or, à cet égard, il a déjà été indiqué que la chambre de recours n’avait pas précisé à quoi elle entendait se référer par la mention de l’expression « nom ‘Gugler’ » (voir point 80 à 83 ci-dessus).

89 En outre, ne ressortent pas de manière suffisante de la décision attaquée les raisons pour lesquelles, eu égard à la jurisprudence rappelée aux points 70 à 76 ci-dessus et aux circonstances en l’espèce, il devait être accordé une importance décisive à une telle utilisation du « signe Gugler ».

90 Certes, ainsi que l’OHMI l’a souligné lors de l’audience, il ne saurait être exigé des chambres de recours de fournir un exposé qui suivrait exhaustivement et un par un tous les raisonnements articulés par les parties devant elles. La motivation peut donc être implicite à condition qu’elle permette aux intéressés de connaître les raisons pour lesquelles la décision de la chambre de recours a été adoptée et au juge de l’Union de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle

91 Or, la seule explication de la chambre de recours consistant à indiquer que « [d]emander l’enregistrement d’une marque communautaire aurait, dès lors, constitué une initiative logique et totalement justifiée » ne peut suffire afin de comprendre en quoi, en présence de relations, à tout le moins d’affaires, entre la requérante et Gugler GmbH, les divers éléments avancés par la requérante et mentionnés par la chambre de recours (voir point 79 ci-dessus) étaient dépourvus de pertinence.

92 Dans ces circonstances, il doit être constaté que la chambre de recours n’a pas motivé à suffisance de droit la décision attaquée en omettant, d’une part, de préciser à quoi elle se référait en mentionnant le « nom ‘Gugler’ », cet élément semblant avoir constitué un point essentiel de son analyse, et, d’autre part, d’expliciter en quoi les arguments invoqués par la requérante, résumés au point 7 de la décision attaquée et repris par la chambre de recours au point 30 de ladite décision, n’altéraient pas sa conclusion relative à l’absence de mauvaise foi du déposant de la marque contestée.
….
94 Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu d’annuler la décision attaquée, en ce que la chambre de recours a violé l’obligation de motivation que lui impose l’article 75 du règlement n° 207/2009 lorsqu’elle a statué sur le motif de nullité invoqué par la requérante fondé sur l’article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.