Faut-il déposer ses marques en couleur ou en noir et blanc ?

Lors de son dépôt, le demandeur à l’enregistrement de marque peut préciser s’il revendique une ou des couleurs particulières associées à son signe. Une marque déposée sans l’indication de couleur voit-elle sa protection limitée au noir et blanc ?

La Cour de cassation apporte un début de réponse.

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu les articles L. 712-1 et L. 713-1 du code de la propriété intellectuelle ;

Attendu qu’après avoir constaté que les deux marques françaises figuratives de la société C….., enregistrées sous les n° 05……………… et 10 ………………., portaient sur la représentation d’un noeud papillon stylisé et relevé que, dans ses conclusions d’appel incident, la société S…..  accessoires reconnaissait que les marques invoquées étaient dépourvues de couleur, l’arrêt, pour rejeter la demande en contrefaçon de la société C…., retient que ces marques sont en noir et blanc tandis que le signe litigieux est en métal doré ;

Qu’en statuant ainsi, alors qu’il ressort des productions que les marques litigieuses avaient été déposées sans revendication de couleurs, la cour d’appel, en ajoutant des caractéristiques ne figurant pas dans les enregistrements de ces marques, a violé les textes susvisés ;

Sur le moyen, pris en sa quatrième branche :

Vu l’article L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle ;

Attendu qu’est interdite, sauf autorisation du propriétaire, s’il peut en résulter un risque de confusion, l’imitation d’une marque pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l’enregistrement ; que le risque de confusion doit s’apprécier globalement, par référence au contenu des enregistrements des marques, vis-à-vis du consommateur des produits tels que désignés par ces enregistrements et sans tenir compte des conditions d’exploitation des marques ou des conditions de commercialisation des produits ;

Attendu que pour retenir qu’il n’existe aucun risque de confusion dans l’esprit du public entre les produits vendus par les sociétés C…. et S…., l’arrêt relève que les marques sont apposées sur des produits essentiellement masculins, tandis que le signe litigieux l’est sur des produits davantage féminins et à visée décorative ;

Qu’en statuant ainsi, au vu des conditions d’exploitation des marques pour la commercialisation des produits, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le pourvoi principal :

Vu l’article 625 du code de procédure civile ;

Attendu que la cassation de l’arrêt en ses dispositions relatives à la demande en contrefaçon de marques entraîne, par voie de conséquence, celle de ses dispositions prononçant sur la demande reconventionnelle en indemnisation de la société S……, lesquelles s’y rattachent par un lien de dépendance nécessaire ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les deux autres griefs du pourvoi incident :

CASSE ET ANNULE, mais en ses seules dispositions rejetant la demande en contrefaçon de la société C …………… et la demande reconventionnelle en indemnisation de la société S ……, l’arrêt rendu le 26 septembre 2014, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris, autrement composée ;

Vantablack, si mystérieux !

Vantablack, ce noir si profond dont parle la presse d’aujourd’hui. Le Monde

noir
Ceci n’est pas ce noir

Comment se l’approprier ?

1°) Par un enregistrement à titre de marque ?

  • Par exemple, cette marque internationale remontant au 30 juillet 2014 pour désigner :

Produits chimiques pour l’industrie, la science et la photographie; revêtements pour objectifs; revêtements liquides; produits chimiques pour la fabrication de revêtements de protection; additifs chimiques pour la fabrication de revêtements de protection; fluides de calibrage; substances et agents d’absorption des rayonnements; produits chimiques pour l’absorption des rayonnements; compositions d’absorption des rayonnements; substances chimiques pour l’absorption de la lumière; compositions d’absorption de la lumière; révélateurs à utiliser avec des matériaux photosensibles.

Appareils et instruments scientifiques, nautiques, géodésiques, photographiques, optiques, de pesage, de mesurage, de signalisation, de contrôle (inspection) et d’enseignement; dispositifs de calibrage; appareils de vérification de calibrage; objectifs optiques, amplificateurs optiques; filtres optiques; scanners optiques; émetteurs-récepteurs optiques; émetteurs optiques; appareils optiques de laboratoire; composants électroniques optiques; dispositifs de transmission optique numérique; appareils et instruments optiques; capteurs électriques; capteurs électromagnétiques; capteurs de rayonnements électromagnétiques; capteurs de rayonnements; capteurs optiques; logiciels informatiques et matériel informatique; appareils et dispositifs à utiliser dans des laboratoires et dans l’industrie chimique et pour l’établissement de propriétés de matériaux; supports de données magnétiques, machines à calculer, équipements de traitement de données et ordinateurs; appareils et instruments de pulvérisation; parties et garnitures de tous les produits précités.

  • Ou par cette autre marque internationale du 22 avril 2015

Produits chimiques pour l’industrie, la science et la photographie; revêtements pour objectifs; revêtements liquides; produits chimiques pour la fabrication de revêtements de protection; additifs chimiques pour la fabrication de revêtements de protection; fluides de calibrage; substances et agents d’absorption des rayonnements; produits chimiques pour l’absorption des rayonnements; compositions d’absorption des rayonnements; substances chimiques pour l’absorption de la lumière; compositions d’absorption de la lumière; révélateurs à utiliser avec des matériaux photosensibles.

Téléphones mobiles; appareils de prise de vues numériques; baladeurs multimédias; ordinateurs portables; casques d’écoute sans fil pour téléphones mobiles, smartphones et tablettes électroniques; batteries rechargeables; chargeurs de batterie; étuis pour téléphones mobiles, smartphones et tablettes électroniques; étuis à rabat pour téléphones mobiles, smartphones et tablettes électroniques; tablettes électroniques; récepteurs de télévision; composants électroniques audio, à savoir ambianceurs; boîtiers décodeurs numériques; lecteurs de DVD; affichages à diodes électroluminescentes; moniteurs (matériel informatique); lunettes 3D; ordinateurs; imprimantes d’ordinateur; semi-conducteurs; smartphones; logiciels d’applications mobiles; appareils et instruments scientifiques, nautiques, géodésiques, photographiques, optiques, de pesage, de mesurage, de signalisation, de contrôle (inspection) et d’enseignement; dispositifs de calibrage; appareils de vérification de calibrage; objectifs optiques, amplificateurs optiques; filtres optiques; scanners optiques; émetteurs-récepteurs optiques; émetteurs optiques; appareils optiques de laboratoire; composants électroniques optiques; dispositifs de transmission optique numérique; appareils et instruments optiques; capteurs électriques; capteurs électromagnétiques; capteurs de rayonnements électromagnétiques; capteurs de rayonnements; capteurs optiques; logiciels informatiques et matériel informatique; appareils et dispositifs à utiliser dans des laboratoires et dans l’industrie chimique et pour l’établissement de propriétés de matériaux; supports de données magnétiques, machines à calculer, équipements de traitement de données et ordinateurs; appareils et instruments de pulvérisation; parties et garnitures de tous les produits précités.

 Métaux précieux et leurs alliages et produits fabriqués dans ces matières ou en plaqué; pierres précieuses et semi-précieuses; produits horlogers et autres instruments chronométriques; montres, horloges et pendules, bijoux véritables et de fantaisie; articles de bijouterie fantaisie; insignes en métaux précieux ou métaux semi-précieux; breloques; boîtes à bijoux; boucles en métaux précieux ou métaux semi-précieux; figurines en métaux précieux ou métaux semi-précieux; porte-clefs; breloques porte-clés; ronds de serviettes en métaux précieux ou métaux semi-précieux; épingles de cravates et fixe-cravates; boutons de manchettes; parties et garnitures de tous les produits précités.

2°) Ou s’agirait-il d’un produit breveté ?

Par exemple, par un de ces brevets ?

WO_2006120449_A1-1

WO_2010086600_A2-1

WO_2010119263_A1-1

Marque rouge et marque figurative comment apprécier le risque de confusion ?

Comment apprécier phonétiquement le risque de confusion avec un signe figuratif ? Quelle protection accorder à une marque portant sur une couleur ?  L’arrêt du 16 juillet 2015 est d’une grande importance pratique. L’arrêt est ici.

  • 29 janvier 2010 : L…….  dépose la demande de marque communautaire sur le signe :

Dépôt de marque communautaire

Description jointe à la demande : « La marque consiste en la couleur rouge (code Pantone n°18.1663TP) appliquée sur la semelle d’une chaussure telle que représentée (le contour de la chaussure ne fait donc pas partie de la marque mais a pour but de mettre en évidence l’emplacement de la marque). »

Pour « Chaussures à talons hauts (à l’exception des chaussures orthopédiques) ».

  • 10 novembre 2011 : opposition par R……  qui invoque la marque

Opposition à marque communautaire, avocat

  • 21 juin 2013 : l’opposition est rejetée
  • 28 mai 2014 : la Chambre de recours rejette le recours de R……….

De l’arrêt du 16 juillet 2015 du Tribunal qui rejette le recours , quelques extraits sont à citer.

Le rappel de la position de la Chambre de recours

38 Tout d’abord, s’agissant de la marque demandée, la chambre de recours a précisé, en s’appuyant sur la décision précédemment rendue par la deuxième chambre de recours le 16 juin 2011 (voir point 6 ci-dessus), que l’impression d’ensemble produite par celle-ci consistait en la couleur rouge Pantone n° 18.663TP appliquée à une semelle de chaussure à talon haut.

39 Ensuite, s’agissant de la marque antérieure, premièrement, la chambre de recours a considéré que l’élément verbal au sein de celle-ci, à savoir les mots « my shoes », était descriptif des produits en cause. Deuxièmement, en ce qui concerne plus particulièrement le rectangle rouge dans lequel s’inscrit le mot « shoes », elle a constaté que celui-ci était banal sur le plan graphique et qu’il n’était pas distinctif malgré sa couleur rouge, puisque celui-ci servait de fond ou d’étiquette pour souligner le mot « shoes » et était donc purement décoratif. Dès lors, elle a conclu que, dans l’impression d’ensemble produite par la marque antérieure, tous les éléments étaient d’une importance égale.

40 Enfin, elle a considéré que les marques en cause, dont l’une était constituée d’une semelle rouge appliquée à une chaussure à talon haut et l’autre d’un signe tricolore comportant des éléments verbaux, ne présentaient aucune similitude pertinente sur le plan visuel.

……..

La comparaison visuelle

43 Il convient de constater, tout d’abord, que la marque demandée, telle qu’elle est décrite dans la demande d’enregistrement, consiste en la couleur rouge (code Pantone n°18.1663TP) appliquée à un emplacement spécifique d’une chaussure, en l’occurrence sur la semelle, et c’est à juste titre que la chambre de recours a constaté, en substance, qu’il s’agissait de prendre en compte tous ces éléments, dans leur combinaison spécifique, lors de l’analyse de l’impression d’ensemble produite par ce signe sur le consommateur.

44 Ensuite, il y a lieu d’observer que la marque antérieure est, quant à elle, une marque complexe constituée d’un carré et d’un rectangle, respectivement de couleur bleue et rouge, et d’un élément verbal composé des mots « my shoes ». Le terme « my » est écrit en petits caractères blancs et en italique et apparaît sur le carré bleu. Le terme « shoes » est écrit en lettres majuscules blanches et apparaît sur le rectangle rouge.

45 Or, il importe de relever que l’argumentation de la requérante, en ce que celle-ci cherche à démontrer l’existence d’une similitude visuelle tirée de ce que la couleur rouge serait présente au sein des deux signes en cause, ne saurait prospérer.

46 Premièrement, il y a lieu de constater que la couleur rouge ne saurait être considérée comme étant prédominante au sein de la marque antérieure. En effet, cette couleur n’est présente que dans le rectangle sur lequel figure le mot « shoes ».

48 ………..s’agissant de la couleur rouge en tant que telle, car, s’il est vrai que celle-ci est susceptible d’attirer davantage l’attention des consommateurs, il n’en reste pas moins qu’elle n’occupe qu’une partie minoritaire du signe, contrairement à ce que fait valoir la requérante. Est donc sans incidence l’argument de la requérante concernant la similitude des nuances de rouge des deux signes en conflit.

49 De surcroît, il doit être observé que c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré, au point 31 de la décision attaquée, que le rectangle rouge avait un rôle décoratif et était donc d’une importance secondaire

La comparaison phonétique

62 ……….. le public pertinent se référera à la marque antérieure en prononçant son élément verbal, à savoir « my shoes ».

63 En revanche, en ce qui concerne la marque demandée, il convient de relever que l’intervenant la qualifie de « marque de position ». À cet égard, il convient d’observer que ni le règlement n° 207/2009, ni le règlement (CE) n° 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement n° 40/94 (JO L 303, p. 1), ne mentionnent les « marques de position » en tant que catégorie particulière de marques. Or, indépendamment de la question de savoir si cette qualification est correcte, il ressort de la jurisprudence que de telles marques se rapprochent des catégories de marques figuratives et tridimensionnelles, dès lors qu’elles visent l’application d’éléments figuratifs ou tridimensionnels à la surface d’un produit….

64 Dès lors, il y a lieu de considérer, ainsi que l’a indiqué la chambre de recours au point 35 de la décision attaquée, qu’il n’existe pas de similitude phonétique entre les signes en conflit. En effet, à supposer que la comparaison phonétique puisse être effectuée, c’est-à-dire en appliquant, par analogie, le raisonnement visant les marques purement figuratives tel que rappelé au point 61 ci-dessus, il est vraisemblable que la marque demandée soit transmise oralement grâce à une description du signe. Au demeurant, la requérante n’a ni invoqué une description précise de la marque demandée qui permettrait d’effectuer une comparaison phonétique, ni contesté l’abstraction du signe qui rendrait impossible une telle comparaison.

La comparaison conceptuelle

67 La requérante soutient qu’il existe une certaine similitude sur le plan conceptuel entre les signes en conflit, dans la mesure où tous deux présentent un lien avec les chaussures, la marque demandée par le fait que la couleur rouge est apposée sur la semelle d’une chaussure et la marque antérieure par la présence du mot « shoes ». En outre, lesdits signes seraient même conceptuellement similaires dans la mesure où ceux-ci ont en commun la couleur rouge et les significations conceptuelles que le public attache à cette couleur, telles que la chaleur, l’agression ou la passion.

69 En premier lieu, il convient de rejeter l’argument de la requérante selon lequel les marques en conflit présenteraient un lien conceptuel en raison de la présence, dans celles-ci, de la couleur rouge. En effet, d’une part, la requérante n’étaye pas l’existence d’un concept déterminé, véhiculé par la couleur rouge, se rapportant aux produits concernés, mais se contente d’énumérer différentes hypothèses d’interprétation que le consommateur pourrait attacher à cette couleur. D’autre part, ainsi qu’il a été énoncé aux points 38 et 56 ci-dessus, c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré que tous les éléments de la marque antérieure étaient d’importance égale et que la marque demandée devait être prise en compte dans son ensemble. Dès lors, la comparaison conceptuelle ne peut se limiter à ne tenir compte que d’une des caractéristiques des marques en conflit, sauf à méconnaître la jurisprudence citée au point 36 ci-dessus selon laquelle l’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci et , à cet égard, il doit être rappelé que le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails.

70 En second lieu, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel les signes en question renvoient tous deux à l’idée d’une chaussure, premièrement, il y a lieu de constater que, au sein de la marque antérieure, le carré et le rectangle de couleur n’ont pas de signification particulière au regard des produits visés. L’élément verbal « my shoes », cependant, est constitué de deux mots anglais signifiant « mes chaussures », ceux-ci faisant d’ailleurs partie du vocabulaire anglais connu et compris par une grande partie du public pertinent ………………. Deuxièmement, il doit être observé que la marque demandée consiste en une couleur apposée sur la semelle d’une chaussure à talon haut.

71 Or, à supposer qu’une comparaison conceptuelle soit possible dans la mesure où la marque demandée ne comporte aucun élément verbal, il y a lieu de relever que la requérante se borne à constater que ladite marque consiste en une couleur apposée sur une semelle, sans étayer toutefois la signification conceptuelle qu’elle tire de ce constat.

Protection des couleurs par l’action en concurrence déloyale, l’examen minutieux de l’arrêt du 4 janvier 2012 de la Cour de Paris à propos de l’emploi d’un code de couleurs marron, jaune, blanc, rose, rouge, vert

Ce blog cite régulièrement des décisions de justice mettant en cause des marques portant sur des couleurs.

L’arrêt du 4 janvier 2012 rendu par la Cour de Paris est intéressant non qu’il se prononce sur des couleurs protégées par des marques mais en leur absence, sur une action en concurrence déloyale.

Pour la bonne compréhension de l’arrêt, indiquons qu’une demande en contrefaçon de brevet avait été présentée mais qu’elle a été rejetée successivement par le Tribunal puis par la Cour parce que le brevet a été annulé pour défaut d’activité inventive.

L’appelant dont l’action en contrefaçon a été rejetée, alléguait des actes de concurrence déloyale par reprise de couleurs .

Ci-après est reproduite la motivation de la Cour pour rejeter également cette action en concurrence déloyale. Vous noterez la finesse d’analyse des magistrats et la volonté d’expliquer leur position au regard de la technique en cause.

  • Tout d’abord, le rappel du principe

Considérant en droit, que le principe de la liberté du commerce implique qu’un produit qui ne fait pas l’objet de droits de propriété intellectuelle, puisse être librement reproduit, sous certaines conditions 6tenant, notamment, à l’absence de faute par la création d’un risque de confusion dans l’esprit de la clientèle sur l’origine du produit, préjudiciable à l’exercice paisible et loyal du commerce ;
Considérant que l’appréciation de la faute au regard du risque de confusion, doit résulter d’une approche concrète et circonstanciée des faits de la cause prenant en compte notamment, outre le caractère plus ou moins servile de la reproduction ou de l’imitation, l’ancienneté, l’originalité et la notoriété du produit copié ;

  • Venons maintenant à la situation technique dans laquelle les couleurs sont utilisées

Considérant que la société C….., qui reconnaît ne pas exploiter le brevet litigieux mais un autre brevet protégeant une autre forme de contrôle du sertissage au moyen d’une bague de visualisation non sécable, fait ici valoir qu’elle a été la première à utiliser un code couleur pour l’identification de ses produits, à savoir la couleur vert anis pour les bagues de contrôle de sertissage et, selon le diamètre du raccord à sertir, les couleurs marron, jaune, blanc, rose, rouge, vert pour les inserts correspondants, introduits dans les mâchoires de la presse de sertissage et fait grief à la société U……. d’avoir délibérément recherché, en reprenant un mode d’identification du couple bague de visualisation / insert par un code couleur, à semer la confusion dans l’esprit de la clientèle ;
Or considérant qu’il importe de relever, dès lors que l’ensemble des circonstances de l’espèce doit être pris en compte dans l’appréciation du risque de confusion, qu’il n’est pas démenti que la bague de visualisation non sécable telle qu’exploitée par la société C……. reste en place sur le raccord et n’est pas détruite, à la différence de la bague de visualisation U……, mais déformée par le sertissage, de telle sorte que le professionnel des raccords de tuyaux, utilisateur des bagues de visualisation, sera à même de distinguer celles provenant de la société C….. de celles provenant de la société U………., d’abord et en premier lieu, à raison de leur comportement différent sous l’effet du processus de sertissage ;

Considérant ensuite, que l’identification des produits au moyen d’un code couleur est banale dans les usages du commerce et la société C……. , qui souligne elle-même dans ses écritures qu’un tel moyen constitue un indicateur simple et attractif de la fonction ou de la destination du produit, ne saurait en revendiquer le monopole ;
Que force est de constater, en toute hypothèse, que la société C……. utilise une couleur unique, vert anis, pour les bagues de visualisation, quel que soit leur diamètre et des couleurs différentes, en fonction du diamètre, pour les inserts : marron pour un diamètre de 14, jaune pour le 16, blanc pour le 18, rose pour le 20, rouge pour le 25/26, vert pour le 32 ; que la société U……utilise quant à elle, au vu de la plaquette de présentation appréhendée au cours des opérations de saisie-contrefaçon, une couleur identique pour le couple bague de visualisation /insert, couleur qui diffère selon le diamètre de la bague de visualisation et de l’insert correspondant : beige pour un diamètre de 16, rose pour le 18, orange pour le 20, marron pour le 25/26, vert pour le 32 ; que les deux sociétés utilisent en conséquence, pour chaque diamètre considéré, un code couleur différent, étant à cet égard relevé en ce qui concerne le diamètre 32, que le vert anis de la société C…….. se distingue aisément du vert foncé de la société U……. ;

  • La conclusions sur l’absence de risque de confusion

Considérant qu’il suit de ces observations que l’utilisation incriminée d’un code couleur pour les ensembles bagues de visualisation/ inserts U…….ne crée pas un risque de confusion dans l’esprit de l’utilisateur des produits concernés qui ne serait pas fondé à attribuer aux bagues de visualisation commercialisées par les sociétés concurrentes une origine commune ;

L’amendement qui vise à limiter la protection des marques qui portent sur la forme et la couleur des médicaments


Le 24 septembre 2011, l’amendement présenté par M Robinet propose d’autoriser les exploitants de médicaments génériques à reproduire les marques utilisées par le médicament quand celles-ci portent sur la forme ou la couleur.Amendement sur les médicaments génériques et les marques sur la forme et la couleur des médicaments

Cet amendement intervient lors des débats sur le renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de la santé

L‘article proposé

APRÈS L’ARTICLE 30, insérer l’article suivant :

Après l’article L. 713-6 du code de la propriété intellectuelle, il est inséré un article L. 713-7 ainsi rédigé :

« Art. L. 713-7. – L’enregistrement d’une marque protégeant l’aspect tridimensionnel ou la couleur de la forme pharmaceutique d’une spécialité de référence ne permet pas à son titulaire d’interdire l’usage par un tiers du même signe ou d’un signe similaire pour une spécialité générique au sens du 5° de l’article L. 5121-1 du code de la santé publique, destinée à être substituée à cette spécialité de référence dans les conditions prévues par l’article L. 5125-23 dudit code, pour autant que cet usage ne soit pas tel qu’il donne l’impression qu’il existe un lien commercial entre le tiers et le titulaire de la marque. ».

Est reproduit également l’exposé de cet amendement

Cet article entend faciliter le développement des médicaments génériques et favoriser l’observance des traitements en créant une dérogation à la protection des droits de propriété intellectuelle pour ce qui concerne certains éléments non essentiels du médicament de référence (couleur, forme).

En effet, certaines personnes, notamment les plus âgées, ont parfois des difficultés d’observance de traitements, perturbés par le changement d’apparence du générique par rapport à son princeps. Cet amendement vise donc à autoriser les spécialités génériques à disposer des mêmes caractères d’apparence que les spécialités de référence auxquelles elles se substituent sans pour autant porter atteinte aux règles de protection des marques et dessins.

Sur ce dernier point, le lecteur aura relevé que cet amendement ne vise qu’à modifier les dispositions du droit des marques et non celles applicables aux dessins et modèles

A rappeler également que la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 contenait un article 36 :

(CMP) Article 29 bis 36

Après l’article L. 5121-10-2 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 5121-10-3 ainsi rédigé :

« Art. L. 5121-10-3. – Le titulaire d’un droit de propriété intellectuelle protégeant l’apparence et la texture des formes pharmaceutiques orales d’une spécialité de référence au sens de l’article L. 5121-1 ne peut interdire que les formes pharmaceutiques orales d’une spécialité générique susceptible d’être substituée à cette spécialité en application de l’article L. 5125-23 présentent une apparence et une texture identiques ou similaires. »

 

Article qui a été censuré par le Conseil Constitutionnel dans sa décision n° 2009-596 du 22 décembre 2009 :

Considérant que ces dispositions n’ont pas d’effet ou ont un effet trop indirect sur les dépenses des régimes obligatoires de base ou des organismes concourant à leur financement ; que, par suite, elles ne trouvent pas leur place dans une loi de financement de la sécurité sociale ;

A rappeler enfin, une tendance des juges français à limiter à la seule commercialisation les mesures d’interdiction en cas de contrefaçon alléguée de brevet et de CCP