- Quelques dates
20 novembre 2001 : dépôt de la marque LAGUIOLE par M Szajner.
17 janvier 2005 : enregistrement de la marque par l’OHMI.
22 juillet 2005 : demande en nullité partielle de cette marque communautaire présentée par la société la Forge de Laguiole fondée sur le droit de sa dénomination sociale.
27 novembre 2006 : la division d’annulation de l’OHMI rejette la demande en nullité.
Recours par la société la Forge de Laguiole
1er juin 2011 : la chambre de recours de l’OHMI annule partiellement la marque communautaire.
M. Szajner saisit le Tribunal.
- Tout d’abord, il faut relever que l’existence des marques nationales antérieures de M Szajner n’a pas été prise en compte
31 Dans la mesure où, lors de l’audience, le requérant, par référence à ses marques françaises LAGUIOLE, déposées en 1993, a tenté de remettre en cause le caractère antérieur de la dénomination sociale de l’intervenante sous sa forme actuelle, par rapport à la marque communautaire LAGUIOLE, il suffit d’observer que seule est pertinente, en l’espèce, la date de dépôt de ladite marque communautaire, à savoir le 20 novembre 2001
- L’application éventuellement rétroactive des revirements de jurisprudence
7 Deuxièmement, même à considérer qu’il faille comprendre l’arrêt de la Cour de cassation française du 10 juillet 2012 (point 20 supra) comme opérant un revirement de la jurisprudence, de tels revirements, en principe, s’appliquent rétroactivement aux situations existantes.
48 Ce principe se justifie par la considération que l’interprétation jurisprudentielle d’une norme à un moment donné ne peut être différente selon l’époque des faits considérés et nul ne peut se prévaloir d’un droit acquis à une jurisprudence figée. S’il est vrai que ce principe est susceptible d’être atténué en ce que, dans des situations exceptionnelles, les juridictions peuvent s’en départir pour moduler l’effet dans le temps de la rétroactivité d’un revirement, la rétroactivité des revirements reste le principe. Or, en l’espèce, l’arrêt de la Cour de cassation française du 10 juillet 2012 (point 20 supra) ne contient aucune modulation ou limitation en ce sens.
49 Il convient d’ajouter, à cet égard, que le principe analogue est appliqué par les juridictions de l’Union (arrêt de la Cour du 11 août 1995, Roders e.a., C‑367/93 à C‑377/93, Rec. p. I‑2229, points 42 et 43).
50 Dès lors, même si l’arrêt de la Cour de cassation française du 10 juillet 2012 (point 20 supra) est en tant que tel un fait nouveau, il se borne à dire le droit français tel qu’il aurait dû être appliqué par la chambre de recours dans la décision attaquée, datant du 1er juin 2011, et tel qu’il doit être appliqué par le Tribunal, conformément au principe rappelé au point 29 ci-dessus.
- C’est la protection de la dénomination sociale après l’arrêt de la Cour de cassation du 10 juillet 2012 qui doit être prise en compte pour apprécier la légalité de la décision du 1er juin de l’OHMI
51 Il s’ensuit que, en l’espèce, la protection de la dénomination sociale Forge de Laguiole s’étend exclusivement aux activités effectivement exercées par l’intervenante à la date de la demande de la marque LAGUIOLE, le 20 novembre 2001.
- Le caractère non distinctif d’un signe pourtant pris en compte par l’OHMI va se trouver annulé par l’arrêt du 21 octobre 2014
116 La chambre de recours a considéré que le terme « laguiole », quoique descriptif et donc non distinctif pour les couteaux, ainsi qu’il avait été constaté par la cour d’appel de Paris dans son arrêt du 3 novembre 1999 (G.T.I.-G.I.L. Technologies internationales/Commune de Laguiole et Association Le couteau de Laguiole), était néanmoins l’élément dominant, ou du moins codominant, de la dénomination sociale Forge de Laguiole, même lorsque cette dernière était utilisée pour des couteaux. Dès lors, selon elle, dans une appréciation globale, les signes en conflit présentaient une certaine similitude phonétique, visuelle et conceptuelle, qui ne saurait être contrebalancée par la seule adjonction de l’expression générique « forge de ».
………
121 En premier lieu, il est vrai, ainsi que la chambre de recours l’affirme au point 119 de la décision attaquée, que le caractère descriptif et non distinctif du terme « laguiole » pour des couteaux n’implique pas nécessairement que ce terme est également descriptif et non distinctif pour des produits qui ne sont pas des couteaux.
122 Il convient toutefois de rappeler, à cet égard, que le présent examen du risque de confusion concerne exclusivement les activités de fabrication et de vente de coutellerie et de couverts, ainsi que de cadeaux et de souvenirs, dans la mesure où il s’agit de coutellerie ou de couverts (voir point 74 ci-dessus). En effet, les activités effectivement exercées de l’intervenante se concentrent quasi exclusivement dans le domaine de la coutellerie, à l’inclusion de certains articles incorporant d’autres fonctions, en plus de celles de couteau, et que la commercialisation d’autres produits – en particulier, des couverts – reste accessoire, voire marginale. Cela ressort tant d’un examen des produits figurant dans la liste de prix de l’intervenante au 1er janvier 2001 que de la lecture des différents articles de presse figurant dans le « press-book » produit par l’intervenante – pour autant qu’ils se rapportent clairement à la période antérieure au 20 novembre 2001 – dans lesquels l’intervenante se présente systématiquement comme une coutellerie spécialisée dans la production de couteaux de type « Laguiole », sans que l’exploitation d’autres activités n’y soit mentionnée. S’il est vrai que certains de ces articles évoquent des intentions de diversification des activités de la part des dirigeants de l’intervenante, cette dernière n’a pas démontré, ainsi qu’il a été relevé ci-dessus, que ces intentions aient été mises en œuvre, avant la date du 20 novembre 2001.
123 Dans ces conditions, il convient de conclure que le terme « Laguiole » présente un caractère descriptif, voire générique, pour la totalité des activités de l’intervenante, pertinentes aux fins de l’examen du risque de confusion.
- Le pouvoir distinctif de la dénomination sociale Forge de Laguiole est écarté pour les couteaux
160 Dans ces circonstances, c’est de manière erronée que la chambre de recours a considéré que, à la date du 20 novembre 2001, la dénomination sociale Forge de Laguiole avait acquis, pour les couteaux, un caractère distinctif supérieur à la norme en raison de la connaissance qu’en avait le public français.
- Cette dénomination sociale a un faible pouvoir distinctif pour les autres produits que les couteaux pour lesquels au regard de l’identité de ceux-ci avec les produits visés à la marque, il y a un risque de confusion.
Le 21 octobre , le Tribunal annule partiellement la décision de la Chambre de recours en ce qu’elle a annulé la marque communautaire pour certains produits. La liste de ces produits est indiquée à l’arrêt. L’arrêt est ici