Contrat de licence de marque ou contrat de service ? L’arrêt du 19 juillet 2012 de la Cour de l’Union dit que l’enregistrement d’une marque en tant que nom de domaine ne vaut pas le droit de l’utiliser commercialement avec ses fonctions propres

L’arrêt rendu le 19 juillet 2012 par la Cour de Justice , affaire C-376/11, se prononce sur la distinction entre contrat de licence de marque et contrat de service.

  • La problématique à l’origine des faits

Les règlements 733/2002 et 874/2004 sur le nom de domaine eu ont organisé une période dite de sunrise mais en conditionnent le bénéfice à un critère de présence sur le territoire de l’Union.

Une société qui ne répond pas à ce critère de localisation géographique, passe un contrat de licence ( Licence Agreement ) avec un cabinet situé en Europe :

19      Aux termes de la clause 1 dudit contrat, les seuls objets de celui-ci sont de permettre au licencié d’enregistrer un nom de domaine en son nom mais pour le compte du donneur de licence, de définir les droits et les obligations de chaque partie durant ce même contrat ainsi que d’organiser la procédure selon laquelle le licencié transférera le ou les noms de domaine .eu au donneur de licence ou à la personne désignée par ce dernier.

20      Conformément à la clause 2 du contrat en cause au principal, intitulée «Droits du donneur de licence», celui-ci peut demander à tout instant que le licencié supprime le ou les noms de domaine repris à l’annexe 1 dudit contrat ou transfère le nom de domaine, rapidement et sans charge, au donneur de licence ou à tout tiers désigné par lui.

21      Selon la clause 3 du même contrat, le donneur de licence s’oblige à payer les honoraires du licencié, faute de quoi les noms de domaine peuvent ne pas être enregistrés, maintenus ou renouvelés.

22      À la clause 4 du contrat en cause au principal, qui contient les droits du licencié, il est précisé que celui-ci facturera ses services au donneur de licence.

23      Les obligations du licencié, telles qu’elles figurent à la clause 5 dudit contrat, incluent celle de faire des efforts raisonnables pour déposer une demande .eu et obtenir un enregistrement .eu pour un ou des noms de domaine. Le licencié reconnaît en outre que, lors de l’enregistrement, le nom de domaine sera la propriété exclusive du donneur de licence et admet qu’il n’utilisera pas ce nom d’une quelconque manière incompatible avec les termes de ce contrat.

La société européenne qui demande le même nom de domaine « lensword.eu », se voit opposer  un refus au regard de l’antériorité de la demande formée par le cabinet .

Cette société européenne engage différentes procédures : devant la Cour d’arbitrage chargé du règlement extrajudiciaire puis devant une juridiction belge. Toutes ses actions sont rejetées.

  • En appel,  la Cour de Bruxelles  pose différentes questions préjudicielles auxquelles la Cour de Justice répond le 19 juillet 2012.

49      ……..un contrat, tel que celui en cause au principal, par lequel le cocontractant, dénommé «licencié», s’oblige, contre rémunération, à faire des efforts raisonnables pour déposer une demande et obtenir un enregistrement pour un nom de domaine .eu s’apparente davantage à un contrat de service qu’à un contrat de licence.

….

51      Il importe peu à cet égard qu’un tel contrat précise que celui-ci a notamment pour objet de permettre au licencié d’enregistrer un nom de domaine en son nom, mais pour le compte du donneur de licence si cette faculté ne sert à aucune fin autre que de permettre au cocontractant d’exécuter son obligation d’enregistrer le ou les noms de domaine en question contre rémunération et qu’elle est donc purement accessoire à cette obligation. Par ailleurs, ainsi que Mme l’avocat général l’a relevé aux points 49 et 53 de ses conclusions, l’autorisation d’enregistrer une marque en tant que nom de domaine .eu n’implique nullement que le titulaire de cette marque a concédé à son cocontractant le droit d’utiliser commercialement celle-ci en conformité avec ses fonctions propres.

…..

53      Au vu des considérations qui précèdent, il convient de répondre à la première question que l’article 12, paragraphe 2, troisième alinéa, du règlement n° 874/2004 doit être interprété en ce sens que, dans une situation où le droit antérieur concerné est un droit de marque, les termes «licenciés de droits antérieurs» ne visent pas une personne qui a uniquement été autorisée par le titulaire de la marque concernée à enregistrer, en son nom propre mais pour le compte de ce titulaire, un nom de domaine identique ou similaire à ladite marque, sans pour autant que cette personne soit autorisée à utiliser commercialement celle-ci en conformité avec ses fonctions propres.

 

Contrefaçon de marque, de dessin et modèle, et de brevet : quelle cour d’appel l’avocat doit-il choisir ?

Un de nos précédents articles avait attiré l’intérêt d’un avis de la Cour de cassation pour déterminer devant quelle cour d’appel présenter l’appel d’un jugement postérieur au 1er novembre 2009, Cet article se rapportait à une affaire de brevet.

Une nouvelle illustration en est donnée avec l’arrêt de la Cour de Montpellier du 27 mars 2012 intervenu cette fois, dans une affaire de marque, à la suite d’un  jugement du 30 avril 2010 du Tribunal de Grande Instance de Rodez.

Le tribunal de grande instance de Rodez, saisi d’une assignation délivrée avant le 1er novembre 2009 demeurait compétent pour statuer, les nouvelles règles d’organisation judiciaire n’étant pas applicables à l’instance en cours devant lui ; tel n’est pas le cas, en revanche, en ce qui concerne l’instance d’appel, introduite par Mmes C, M A, la société Coutellerie Glandières, MM. M et M. M, par déclarations des 22 et 24 juin 2010, postérieurement à l’entrée en vigueur des décrets du 9 octobre 2009.

Si le tableau VI annexé à l’article D. 211-6-1 du code de l’organisation judiciaire désigne le tribunal de grande instance de Marseille pour connaître, en tant que juridiction interrégionale, des actions en matière de marques du ressort des cours d’appel d’Aix-en-Provence, Bastia, Montpellier et Nîmes, la juridiction d’appel de ce tribunal de grande instance spécialisé est nécessairement la cour d’appel d’Aix-en-Provence, conformément au tableau IV annexé à l’article D. 311-1 du code de l’organisation judiciaire ; dès lors que l’action diligentée par Mmes C et les autres demandeurs relève désormais de la compétence du tribunal de grande instance de Marseille, spécialisé dans le contentieux des marques, l’instance d’appel contre le jugement statuant sur une telle action, ne peut être porté que devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence, également spécialisée dans ce type de contentieux.

Surtout cet arrêt souligne l’urgence que la Cour de cassation clarifie cette situation

C’est donc à juste titre que le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevables les appels formées devant la cour d’appel de Montpellier, après avoir retenu que la demande, dont il était saisi, s’analysait, non en une exception d’incompétence, mais en une fin de non-recevoir ; l’ordonnance déférée doit en conséquence être confirmée en toutes ses dispositions.

L’arrêt ayant pris le soin au préalable d’indiquer :

Il résulte de l’article 122 du code de procédure civile que constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir ; l’article 125 du même code énonce d’ailleurs que les fins de non-recevoir doivent être relevées d’office lorsqu’elles ont un caractère d’ordre public, notamment lorsqu’elle résultent de l’inobservation des délais dans lesquels doivent être exercées les voies de recours ou de l’absence d’ouverture d’une voie de recours.

En l’occurrence, le moyen qui tend à soutenir que la cour d’appel de Montpellier n’a pas le pouvoir de statuer sur l’appel d’un jugement rendu en matière de marques, sauf à méconnaître les dispositions d’ordre public de l’article D 211-6-1 du code de l’organisation judiciaire, constitue une fin de non-recevoir et non une exception

Les difficultés rencontrées par les avocats et les conseils en propriété industrielle pour apporter des preuves d’usage de la marque

L’arrêt rendu le 13 juin 2012  par le Tribunal montre les difficultés auxquelles les avocats et les conseils en propriété industrielle sont confrontées quand il s’agit d’apporter la preuve de l’exploitation de la marque antérieure

  • Brièvement les marques en cause

– La marque communautaire demandée : CERATIX

Pour « Additifs chimiques permettant d’améliorer la surface et les propriétés d’application des teintures, laques, encres d’imprimerie et produits connexes, en particulier dispersions de cire à base de solvants »;

– La marque antérieure opposée : CERATOFIX

Une marque allemande du 4 septembre 2000 pour « « Produits chimiques à usage industriel, notamment aluminosilicates en tant qu’additifs pour la fabrication de matériaux et de corps de moulage incombustibles ainsi que de glaçures ».

  • La procédure devant l’OHMI

29 juillet 2010 : la division d’opposition considère que la preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure est apportée. L’opposition est accueillie la demande de marque communautaire rejetée;

16 août 2010 : le demandeur à la marque communautaire forme un recours auprès de l’OHMI;

8 avril 2011 : la quatrième chambre de recours de l’OHMI rejette le recours en considérant que « que les documents déposés par la requérante étaient insuffisants aux fins de rapporter la preuve de l’usage sérieux au sens de l’article 42, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 207/2009. En particulier, elle a estimé, au point 21 de la décision attaquée, ne pas pouvoir déterminer les produits auxquels les preuves documentaires concernant les actes d’usage de la marque antérieure faisaient référence ».

  • L’arrêt en rejetant le recours de l’opposant montre les difficultés auxquelles les praticiens , avocat, conseil en propriété industrielle,  sont confrontées quand il s’agit d’apporter la preuve de l’exploitation de la marque antérieure
  • Les documents produits :

–      une déclaration du Dr S., directeur du groupe de produits « spécialités » de la requérante, du 2 juin 2009 ;

–        des reproductions d’emballages ou de sacs portant l’inscription CERATOFIX ;

–        104 factures adressées à des clients en Allemagne s’échelonnant de 2004 à 2008 ;

–        une copie d’une page de la brochure « SCnews » 04/2007 ».

  • L’examen de ceux-ci

Sur la déclaration du D. S.

30……..il résulte de la jurisprudence, d’une part, que, même lorsqu’une déclaration a été établie au sens de l’article 76, paragraphe 1, sous f), du règlement n° 40/94 par l’un des cadres de la requérante, il ne peut être attribué une valeur probante à ladite déclaration que si elle est corroborée par d’autres éléments de preuve……... D’autre part, le fait qu’une telle déclaration émane d’un salarié de la requérante ne saurait à elle seule la priver de toute valeur…].

Mais les  factures,  les reproductions d’emballage et celle de la brochure ne corroborent pas cette déclaration

38      …… il convient de constater que les factures qui ont été transmises par la requérante à l’OHMI comportent uniquement l’énoncé de la marque verbale, la nature du conditionnement ainsi que le numéro de l’article, mais ne précisent pas la nature du produit concerné, en sorte qu’aucune information ne permet de déterminer le produit vendu.

39      En effet, lesdites factures ne permettent pas, per se ou par recoupement avec des catalogues ou d’autres documents, de déterminer la nature des produits qui ont fait l’objet de la transaction matérialisée par la facture établie par la requérante…..

40      Or, en l’absence de toute donnée permettant d’identifier la nature du produit concerné ou, ainsi que l’a relevé à juste titre la chambre de recours au point 23 de la décision attaquée, de listes de références permettant de déterminer, au regard de leur numéro d’article, les produits qui ont été vendus, force est de constater qu’il est impossible de procéder à l’établissement d’un lien entre cette marque et des produits qui en seraient revêtus.

41      En outre, il n’apparaît pas que la preuve de l’usage serait plus difficile à rapporter lorsque les factures sont établies directement par le producteur aux entreprises industrielles que par des agents commerciaux à des clients finaux ou que les preuves présenteraient un caractère probant accru en ce qui concerne ces derniers.

42      En effet, que les produits soient vendus à des entreprises industrielles ou à des clients finaux, il convient de relever que, aux fins de l’établissement de la preuve d’usage sérieux, doivent toutefois figurer sur les factures des informations permettant d’identifier de manière même indirecte la nature du produit faisant l’objet de la transaction concernée.

43      Troisièmement, s’agissant des photographies des emballages portant l’inscription de la marque antérieure, force est de constater qu’elles ne permettent pas de déterminer, directement ou même indirectement, la nature du produit contenu dans lesdits emballages. En effet, ces photographies, dont il n’est pas nécessaire d’examiner la conséquence de l’absence de transmission de celles-ci à l’intervenante du fait du caractère illisible des photocopies adressées à cette dernière, comportent, pour quatre d’entre elles, uniquement la mention « CERATOFIX R 25 KG » suivie de la mention « 06/2009 » et de la mention « LW : 1744 ». La dernière photographie représente plusieurs sacs empilés et emballés ensemble dans un fil plastique transparent laissant apparaître l’inscription suivante : « CERATOFIX WGA M9106 24,5 KG ».

44      Aucune de ces mentions ne renvoie à un document ou à tout autre élément permettant de déterminer la nature du produit contenu dans ces sacs.

45      Quatrièmement, s’agissant de la copie d’une page de la brochure « ‘SCnews’ 04/2007 », force est de constater que cette brochure fournit des informations sur le lancement d’une nouvelle gamme de produits « CERATOFIX », à savoir des additifs spéciaux pour des agents de démoulage, pour la production de pneus et de matières plastiques.

46      Certes, ainsi que la requérante l’a souligné, la Cour a jugé, au point 37 de l’arrêt Ansul, point 19 supra, que l’usage de la marque devait porter sur des produits et des services qui étaient déjà commercialisés ou dont la commercialisation, préparée par l’entreprise en vue de la conquête d’une clientèle, notamment dans le cadre de campagnes publicitaires, était imminente.

47      Ainsi, selon la requérante, l’usage d’une marque peut être considéré comme sérieux lorsque cette marque n’est pas utilisée pour commercialiser des produits, mais pour conquérir de futurs débouchés, ce qui serait établi par la brochure susmentionnée, qui constitue une mesure publicitaire.

48      Toutefois, ainsi que l’a relevé à juste titre l’OHMI, cette brochure ne contient aucune indication concernant la commercialisation ou la vente de produits, mais fait uniquement référence à des « entretiens prometteurs » avec des clients potentiels, ce qui ne constitue, à ce stade, qu’une supposition. Ainsi, cette brochure ne saurait, à elle seule, être assimilée à une campagne publicitaire permettant d’entrevoir une commercialisation imminente concernant des produits spécifiques.

49      Il ressort des points 34 à 48 ci-dessus que la déclaration du Dr S. n’étant pas corroborée par d’autres éléments de preuve, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré qu’elle ne pouvait pas, à elle seule, prouver l’usage sérieux de la marque antérieure.

 

Marque et représentation tridimensionnelle : à propos d’un chien de race scottish terrier et d’un pendantif

S’il devient si difficile d’obtenir une marque sur une forme tridimensionnelle parce que les consommateurs n’y voient pas un signe exerçant les fonctions de la marque, une telle forme peut–elle encore constituer un acte de contrefaçon de marque ?

L’arrêt du 12 juin 2012 se prononce sur le risque de confusion entre une marque et une forme tridimensionnelle

  • Les faits et l’arrêt de la Cour d’appel

Agatha Diffusion est titulaire de la marque figurative française constituée par « la représentation stylisée d’un chien de race scottish-terrier, debout, vu de profil gauche, avec un collier autour du cou » pour désigner des produits des classes 3, 14, 18 et 25 dont les bijoux.

Agatha Diffusion engage une action en contrefaçon contre différentes sociétés Swarovski qui commercialisaient « un pendentif représentant un chien stylisé »

La Cour de Paris condamne pour contrefaçon de marque.

  • La cassation

Différents moyens étaient soumis à la Cour de cassation.

Citons celui qui a été retenu par cet arrêt de cassation du 12 juin 2012

Mais sur le second moyen, pris en sa troisième branche :

Vu les articles L. 711-1 et L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle ;

Attendu que pour retenir le risque de confusion entre la marque litigieuse et le pendentif, l’arrêt retient que leurs dessins présentent une stylisation identique ;

Attendu qu’en se déterminant ainsi, en considérant les seuls dessins et sans prendre en compte la couleur, le matériau, la taille en facettes, ainsi que l’aspect d’ensemble tridimensionnel du pendentif, la cour d’appel, qui n’a pas procédé à l’examen de l’impression d’ensemble produite par la marque et le bijou, n’a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 1er avril 2011, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris, autrement composée ;

Comment la Cour de Justice a sauvé la classification de Nice de l’attaque du groupe de mandataires britanniques

Comment la CJUE va-t-elle traiter dans son arrêt du 19 juin 2012 cette attaque menée par ce groupe de mandataires britanniques ? (Sur cette attaque voir notre précédent post )

Le caractère artificiel du litige

Dans ses observations écrites, l’OHMI soutient que la demande de décision préjudicielle doit être déclarée irrecevable au motif qu’elle revêt un caractère artificiel, de sorte que la réponse de la Cour aux questions préjudicielles serait dépourvue de pertinence pour la résolution du litige au principal.

La Commission européenne émet également des doutes quant au besoin réel de l’enregistrement en cause

La Cour examine le litige mais …..personne n’est dupe

….., les questions portant sur le droit de l’Union bénéficient d’une présomption de pertinence. Le rejet par la Cour d’une demande formée par une juridiction nationale n’est possible que lorsqu’il apparaît de manière manifeste que l’interprétation sollicitée du droit de l’Union n’a aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal, ….

33      Tel n’est cependant pas le cas en l’occurrence. En effet, il est incontesté que la demande d’enregistrement de la marque a été effectivement déposée et que le Registrar l’a refusée, même si celui-ci s’est écarté de sa pratique habituelle. ….

34      Il s’ensuit que la présente demande de décision préjudicielle doit être considérée comme recevable.

Que dit la directive sur l’identification des produits et services à la demande de marque ?

À titre liminaire, il convient de constater qu’aucune disposition de la directive 2008/95 ne régit directement la question de l’identification des produits et des services concernés.

39      Cette constatation ne suffit cependant pas pour conclure que la détermination des produits ou des services aux fins de l’enregistrement d’une marque nationale est une question qui ne relève pas du champ d’application de la directive 2008/95.

…………………….

49  …… la directive 2008/95 exige que les produits ou les services pour lesquels la protection par la marque est demandée soient identifiés par le demandeur avec suffisamment de clarté et de précision pour permettre aux autorités compétentes et aux opérateurs économiques, sur cette seule base, de déterminer l’étendue de la protection demandée.

Quelle place pour la classification de Nice dans le système de la directive ?

50      Il convient de relever que la directive 2008/95 ne contient aucune référence à la classification de Nice et, par conséquent, n’impose aucune obligation ni interdiction pour les États membres de l’utiliser aux fins de l’enregistrement des marques nationales.

Voyons comment la Cour sauve la classification de Nice

51      Cependant, l’obligation d’utiliser cet instrument résulte de l’article 2, point 3, de l’arrangement de Nice qui dispose que les administrations compétentes des États de l’Union particulière, qui compte la quasi-totalité des États membres, feront figurer dans les titres et les publications officiels des enregistrements des marques les numéros des classes de la classification de Nice auxquelles appartiennent les produits ou les services pour lesquels la marque est enregistrée.

52      Étant donné que l’arrangement de Nice a été adopté en application de l’article 19 de la convention de Paris et que la directive 2008/95, aux termes de son considérant 13, ne vise pas à affecter les obligations des États membres découlant de cette convention, il convient de constater que cette directive ne s’oppose pas à ce que les autorités nationales compétentes exigent ou acceptent que le demandeur d’une marque nationale identifie les produits et les services pour lesquels il sollicite la protection conférée par la marque en utilisant la classification de Nice.

Mais les utilisateurs devront être vigilants

53      Toutefois, en vue de garantir l’effet utile de la directive 2008/95 et le bon fonctionnement du système d’enregistrement des marques, une telle identification doit satisfaire aux exigences de clarté et de précision requises par cette directive, ainsi qu’il est constaté au point 49 du présent arrêt.

54      À cet égard, il y a lieu d’observer que certaines des indications générales figurant aux intitulés de classes de la classification de Nice sont, en elles-mêmes, suffisamment claires et précises pour permettre aux autorités compétentes et aux opérateurs économiques de déterminer l’étendue de la protection conférée par la marque, alors que d’autres ne sont pas susceptibles de satisfaire à cette exigence lorsqu’elles sont trop générales et recouvrent des produits ou des services trop variés pour être compatibles avec la fonction d’origine de la marque.

55      Il appartient, dès lors, aux autorités compétentes d’effectuer une appréciation au cas par cas, en fonction des produits ou des services pour lesquels le demandeur sollicite la protection conférée par la marque, afin de déterminer si ces indications satisfont aux exigences de clarté et de précision requises.

56      Par conséquent, la directive 2008/95 ne s’oppose pas à l’utilisation des indications générales des intitulés de classes de la classification de Nice afin d’identifier les produits et les services pour lesquels la protection par la marque est demandée, pour autant qu’une telle identification soit suffisamment claire et précise pour permettre aux autorités compétentes et aux opérateurs économiques de déterminer l’étendue de la protection demandée.

Attention à l’utilisation des intitulés généraux

61      Dès lors, en vue de respecter les exigences de clarté et de précision, précédemment rappelées, le demandeur d’une marque nationale qui utilise toutes les indications générales de l’intitulé d’une classe particulière de la classification de Nice pour identifier les produits ou les services pour lesquels la protection de la marque est demandée doit préciser si sa demande d’enregistrement vise l’ensemble des produits ou des services répertoriés dans la liste alphabétique de la classe particulière concernée ou seulement certains de ces produits ou services. Au cas où la demande porterait uniquement sur certains desdits produits ou services, le demandeur est obligé de préciser quels produits ou services relevant de cette classe sont visés.

62      Une demande d’enregistrement qui ne permet pas d’établir si, par l’utilisation de l’intitulé d’une classe particulière de la classification de Nice, le demandeur vise l’ensemble ou uniquement une partie des produits de cette classe ne saurait être considérée comme suffisamment claire et précise.