Demande de marque communautaire, la renommée reconnue dans un Etat ne vaut pas pour l’Union.

Un arrêt du 18 mars 2016 du Tribunal rappelle que se référer à une précédente décision de ce même tribunal n’est pas la voie de la facilité. L’arrêt est .

La marque communautaire demandée porte sur le signe verbal BIMBO.

Sa demande d’enregistrement vise « Farines, pain et préparations et produits à base de céréales ; produits de pâtisserie et de biscuiterie ».

Successivement, l’examinateur et la Chambre de recours refusent cette demande d’enregistrement. Le refus est fondé sur l’idée que selon un dictionnaire italien, le mot « bimbo » n’était ni affectueux ni familier, mais était le synonyme de « bambino », soit « enfant » en italien, ce qui pouvait laisser croire à la destination des produits ;

Le recours devant le Tribunal est rejeté.

Parmi les arguments examinés, l’acquisition du caractère distinctif de la marque. A cette fin la déposante invoque :
– « document n° 12 : arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 14 décembre 2012 dans l’affaire T 357/11, GRUPO BIMBO, dans lequel le Tribunal reconnaît la renommée de la marque BIMBO en Espagne ;

Voyons ce qu’en dit l’arrêt du 18 mars 2016 :

82 Quatrièmement, s’agissant du document n° 12, soit l’arrêt du 14 décembre 2012, Bimbo/OHMI – Grupo Bimbo (GRUPO BIMBO) (T 357/11, EU:T:2012:696), il convient d’écarter comme étant dépourvu de tout fondement l’argument de la requérante selon lequel le fait que soit apportée la preuve de la renommée de la marque demandée en Espagne, notamment par sa reconnaissance dans ledit arrêt, suffirait pour établir le caractère distinctif de cette marque pour l’ensemble de l’Union.

Analyse éclairée quelques lignes plus loin :

89 Il appartenait donc à la requérante de faire la preuve de l’acquisition d’un caractère distinctif par l’usage dans la partie de l’Union dans laquelle la marque demandée était ab initio dépourvue de tout caractère distinctif, soit, en l’occurrence, en Italie. Or, force est de constater que la requérante n’a pas démontré que la marque demandée avait acquis un caractère distinctif en raison de l’usage qu’elle en avait fait en Italie.

Marque communautaire en damier annulée pour absence de caractère distinctif

L’arrêt rendu le 21 avril 2015 par le Tribunal de l’Union est d’une grande importance pour les marques bidimensionnelles. L’arrêt est ici.

Le signe déposé à titre de marque.

Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé « Produits en cuir et imitations du cuir non compris dans d’autres classes, en particulier boîtes en cuir ou en carton-cuir, enveloppes en cuir ou imitation du cuir ; coffres, sacs et trousses de voyage, sacs-housses de voyage pour vêtements, malles, valises, bagages, coffrets destinés à contenir des articles de toilette dits ‘vanity-cases’, sacs à dos, sacs à main, sacs de plage, sacs à provisions, sacs d’épaule, mallettes, porte-documents, serviettes, cartables, pochettes, articles de maroquinerie notamment portefeuilles, porte-monnaie non en métaux précieux, bourses, étuis pour clés, porte-cartes, porte-chéquiers ; parapluies, parasols, ombrelles, cannes, cannes-sièges ».

27 août 1998 : cette demande de marque communautaire est enregistrée.

28 septembre 2009 : un tiers demande l’annulation de cette marque devant l’OHMI.

11 juillet 2011 : la division d’annulation prononce l’annulation de la marque.

4 mai 2012 : la Chambre de recours confirme la décision d‘annulation.

Le déposant saisit le Tribunal, qui à son tour rejette le recours.

  • Les lecteurs se rappelleront que ce blog avait déjà relevé que ces marques bidimensionnelles sont des marques figuratives qui s’ignorent,  c’est ici

23      Par ailleurs, conformément à la jurisprudence, plus la forme dont l’enregistrement a été demandé en tant que marque se rapproche de la forme la plus probable que prendra le produit en cause, plus il est vraisemblable que ladite forme est dépourvue de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 207/2009. Dans ces conditions, seule une marque qui, de manière significative, diverge de la norme ou des habitudes du secteur et, de ce fait, est susceptible de remplir sa fonction essentielle d’origine n’est pas dépourvue de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 207/2009 …..

24      Cette jurisprudence, développée au sujet des marques tridimensionnelles constituées par l’apparence du produit lui-même, vaut également lorsque la marque contestée est une marque figurative constituée par la représentation bidimensionnelle dudit produit. En effet, en pareil cas, la marque ne consiste pas non plus en un signe indépendant de l’aspect des produits qu’elle désigne ……

25      Tel est également le cas d’une marque figurative constituée par une partie de la forme du produit qu’elle désigne, dans la mesure où le public pertinent la percevra immédiatement et sans réflexion particulière comme une représentation d’un détail particulièrement intéressant ou attrayant du produit en question, plutôt que comme une indication de son origine commerciale

26      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner les arguments de la requérante à l’encontre de la légalité de la décision attaquée.

  • Une marque assimilée à une marque tridimensionnelle

30      Il s’ensuit que c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré, au point 33 de la décision attaquée, que l’élément déterminant de la marque contestée était le fait qu’elle se confondait avec l’aspect du produit concerné.

31      En conséquence, contrairement à ce que fait valoir la requérante, qui prétend que la chambre de recours aurait, à tort, exigé qu’elle démontre que la marque contestée avait atteint un seuil de caractère distinctif plus élevé, c’est, au contraire, à bon droit que la chambre de recours s’est fondée, pour évaluer le caractère distinctif de la marque contestée, sur les principes applicables aux marques tridimensionnelles. En effet, les considérations exposées aux points 24 et 25 ci-dessus justifient l’application de la jurisprudence développée au sujet des marques tridimensionnelles, citée aux points 20 à 23 ci-dessus, également aux marques figuratives constituées par la forme du produit concerné ou la forme d’une partie du produit concerné, dès lors que de telles marques ne sont pas non plus indépendantes de l’aspect du produit qu’elles désignent.

….

  • L’analyse de la marque

39      D’autre part, le motif à trame et à chaîne qui figure à l’intérieur de chacun des carrés du damier correspond à l’effet visuel souhaité d’un entrelacement de deux tissus différents, de quelque nature qu’ils soient (laine, soie, cuir, etc.), ce qui est donc habituel en ce qui concerne des produits tels que ceux relevant de la classe 18.

40      Appliquées aux produits de la classe 18 en cause en l’espèce, il convient de constater que, d’un point de vue graphique, la représentation d’un damier alternant les couleurs marron et beige et l’impression d’un entrelacement de fils ne comportent aucune variation notable par rapport à la représentation conventionnelle de tels produits, en sorte que le public visé ne percevra en réalité qu’un motif banal et courant.

41      Il y a lieu de relever que la juxtaposition de deux éléments qui sont en eux-mêmes non distinctifs ne saurait modifier la perception du public visé quant à l’absence de caractère distinctif ab initio de la marque contestée. La juxtaposition d’un damier et d’un motif à trame et à chaîne ne laisse, en effet, apparaître aucun élément qui diverge de la norme ou des habitudes du secteur concerné, en sorte que l’argumentation de la requérante selon laquelle la marque contestée serait complexe, particulière et originale ne saurait prospérer (voir, en ce sens, arrêt Motif à carreaux gris foncé, gris clair, noir, beige, rouge foncé et rouge clair, point 20 supra, EU:T:2012:442, point 70).

  • Sur la prétendue acquisition du caractère distinctif

84      Il convient, en outre, de rappeler que, conformément à l’article 1er, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, la marque communautaire a un « caractère unitaire », ce qui implique qu’elle « produit les mêmes effets dans l’ensemble de la Communauté ». Il résulte du caractère unitaire de la marque communautaire que, pour être admis à l’enregistrement, un signe doit posséder un caractère distinctif dans l’ensemble de l’Union. C’est ainsi que, selon l’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, une marque devra être refusée à l’enregistrement si elle est dépourvue de caractère distinctif dans une partie de l’Union …

  • A propos des documents apportés pour établir la preuve de l’usage dans quatre pays

104    Il convient de relever que, s’agissant des quatre États membres concernés, à savoir le Danemark, le Portugal, la Finlande et la Suède, la requérante n’a, au regard de la jurisprudence rappelée au point 90 ci-dessus, versé au dossier aucun document contenant des informations concernant la part de marché détenue par la marque contestée, l’intensité et l’importance des investissements faits par l’entreprise pour la promouvoir ainsi que la proportion des milieux intéressés qui identifie le produit comme provenant d’une entreprise déterminée grâce à la marque contestée et n’a transmis aucune déclaration de chambres de commerce et d’industrie ou d’autres associations professionnelles.

105    Lors de l’audience, le conseil de la requérante a, en réponse à une question posée par le Tribunal, confirmé qu’il n’avait fourni aucun des éléments mentionnés au point 104 ci-dessus au motif que la requérante ne connaissait pas la jurisprudence et que seuls avaient été utilisés dans le cadre de la procédure administrative les éléments mis à sa disposition.

120    Il appartenait donc à la requérante de faire la preuve de l’acquisition d’un caractère distinctif par l’usage dans la partie de l’Union dans laquelle la marque contestée était ab initio dépourvue de tout caractère distinctif, soit, en l’occurrence, dans l’ensemble de l’Union. Or, ainsi qu’il résulte du point 104 ci-dessus, la requérante n’a versé au dossier aucun des éléments mentionnés dans la jurisprudence rappelée au point 90 ci-dessus et les éléments produits par elle, tels qu’ils ressortent du point 95 ci-dessus, ne démontrent pas que la marque contestée a acquis un caractère distinctif par l’usage au Danemark, au Portugal, en Finlande et en Suède.