La compétence exclusive de l’INPI tant que les mêmes demandes ne sont pas présentées par les mêmes parties devant le Tribunal dans l’instance en contrefaçon

 L’Ordonnance du 13 novembre relative aux marques prévoit au nouvel article L716-5 une répartition des compétences entre l’INPI et les tribunaux de grande instance pour les actions en nullité et en déchéance des marques.  Limitons-nous aux premières.

 l’INPI se voit reconnaître une compétence exclusive pour l’action en nullité des marques françaises  au regard de certains droits antérieurs par différents renvois aux dispositions du Code de la propriété intellectuelle

 Art. L. 716-5 . Ne peuvent être formées que devant l’Institut national de la propriété industrielle :

1_ Les demandes en nullité exclusivement fondées sur un ou plusieurs des motifs énumérés à l’article L. 711-2, aux 1_ à 5_, 9_ et 10_ du I de l’article L. 711-3, au III du même article ainsi qu’aux articles L. 715-4 et L. 715-9 ;

C’est-à-dire :

Art. L. 711-2

1_ Un signe qui ne peut constituer une marque au sens de l’article L. 711-1 ;

2_ Une marque dépourvue de caractère distinctif ;

3_ Une marque composée exclusivement d’éléments ou d’indications pouvant servir à désigner, dans le commerce, une caractéristique du produit ou du service, et notamment l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique, l’époque de la production du bien ou de la prestation du service ;

4_ Une marque composée exclusivement d’éléments ou d’indications devenus usuels dans le langage courant ou dans les habitudes loyales et constantes du commerce ;

5_ Un signe constitué exclusivement par la forme ou une autre caractéristique du produit imposée par la nature même de ce produit, nécessaire à l’obtention d’un résultat technique ou qui confère à ce produit une valeur substantielle ;

6_ Une marque exclue de l’enregistrement en application de l’article 6 ter de la convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle à défaut d’autorisation des autorités compétentes ;

7_ Une marque contraire à l’ordre public ou dont l’usage est légalement interdit ;

8_ Une marque de nature à tromper le public, notamment sur la nature, la qualité ou la provenance géographique du produit ou du service ;

9_ Une marque exclue de l’enregistrement en vertu de la législation nationale, du droit de l’Union européenne ou d’accords internationaux auxquels la France ou l’Union sont parties, qui prévoient la protection des appellations d’origine et des indications géographiques, des mentions traditionnelles pour les vins et des spécialités traditionnelles garanties ;

10_ Une marque consistant en la dénomination d’une variété végétale antérieure, enregistrée conformément au livre VI du présent code, au droit de l’Union européenne ou aux accords internationaux auxquels la France ou l’Union sont parties, qui prévoient la protection des obtentions végétales, ou la reproduisant dans ses éléments essentiels, et qui porte sur des variétés végétales de la même espèce ou d’une espèce étroitement liée ;

11_ Une marque dont le dépôt a été effectué de mauvaise foi par le demandeur.

Art. L. 711-3

1_ Une marque antérieure :

  1. a) Lorsqu’elle est identique à la marque antérieure et que les produits ou les servicesqu’elle désigne sont identiques à ceux pour lesquels la marque antérieure est protégée ;
  1. b) Lorsqu’elle est identique ou similaire à la marque antérieure et que les produits ou lesservices qu’elle désigne sont identiques ou similaires à ceux pour lesquels la marque antérieure est protégée, s’il existe, dans l’esprit du public, un risque de confusion incluant le risque d’association avec la marque antérieure ;

2_ Une marque antérieure enregistrée ou une demande de marque sous réserve de son enregistrement ultérieur, jouissant d’une renommée en France ou, dans le cas d’une marque de l’Union européenne, d’une renommée dans l’Union, lorsque la marque postérieure est identique ou similaire à la marque antérieure, que les produits ou les services qu’elle désigne soient ou non identiques ou similaires à ceux pour lesquels la marque antérieure est enregistrée ou demandée et lorsque l’usage de cette marque postérieure sans juste motif tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure, ou qu’il leur porterait préjudice ;

3_ Une dénomination ou une raison sociale, s’il existe un risque de confusion dans l’esprit du public ;

4_ Un nom commercial, une enseigne ou un nom de domaine, dont la portée n’est pas seulement locale, s’il existe un risque de confusion dans l’esprit du public ;

5_ Une indication géographique enregistrée mentionnée à l’article L. 722-1 ou une demande d’indication géographique sous réserve de l’homologation de son cahier des charges et de son enregistrement ultérieur ;

9_ Le nom, l’image ou la renommée d’une collectivité territoriale ou d’un établissement public de coopération intercommunale ;

10_ Le nom d’une entité publique, s’il existe un risque de confusion dans l’esprit du public.

III. Ne peut être valablement enregistrée et, si elle est enregistrée, est susceptible d’être déclarée nulle une marque dont l’enregistrement a été demandé par l’agent ou le représentant du titulaire d’une marque protégée dans un Etat partie à la convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle, en son propre nom et sans l’autorisation du titulaire à moins que cet agent ou ce représentant ne justifie sa démarche.

Art. L. 715-4

Outre les motifs de rejet ou de nullité prévus respectivement aux articles L. 712-7 et L. 714-3, une marque de garantie est refusée à l’enregistrement ou, si elle enregistrée, est susceptible d’être déclarée nulle lorsqu’elle ne respecte pas les dispositions des articles L. 715-1 à L. 715-3 ou que son règlement d’usage est contraire à l’ordre public.

Une marque de garantie est également refusée à l’enregistrement ou, si elle est enregistrée, est susceptible d’être déclarée nulle lorsqu’elle risque d’induire le public en erreur sur son caractère ou sa signification, notamment lorsqu’elle est susceptible de ne pas apparaître comme une marque de garantie.

Art. L. 715-9

 Outre les motifs de rejet ou de nullité prévus respectivement aux articles L. 712-7 et L. 714-3, une marque collective est refusée à l’enregistrement ou, si elle est enregistrée, est susceptible d’être déclarée nulle lorsqu’elle ne respecte pas les dispositions des articles L. 715-6 à L. 715-8 ou que son règlement d’usage est contraire à l’ordre public.

Une marque collective est également rejetée ou, si elle enregistrée, est susceptible d’être déclarée nulle lorsqu’elle risque d’induire le public en erreur sur son caractère ou sa signification, notamment lorsqu’elle est susceptible de ne pas apparaître comme une marque collective.

Mais cette compétence exclusive est tempérée par l’exclusivité des Tribunaux de grande instance

  • En cas d’action en contrefaçon ou d’action en concurrence déloyale;

1_ Lorsque les demandes mentionnées aux 1_ et 2_ du I sont formées à titre principal ou reconventionnel par les parties de façon connexe à toute autre demande relevant de la compétence du tribunal et notamment à l’occasion d’une action introduite sur le fondement des articles L. 716-4, L. 716-4-6, L. 716-4-7 et L. 716-4-9 ou à l’occasion d’une action en concurrence déloyale ;

  • En cas d’exécution des actions visant à faire cesser l’atteinte à la marque avant l’engagement de l’action en contrefaçon

2_ Lorsque les demandes mentionnées aux 1_ et 2_ du I sont formées alors que, soit des mesures probatoires, soit des mesures provisoires ou conservatoires ordonnées afin de faire cesser une atteinte à un droit de marque, sont en cours d’exécution avant l’engagement d’une action au fond.

Marque communautaire : l’OHMI et le tribunal doivent permettre aux parties de fournir leurs observations sur la jurisprudence nationale

L’arrêt du 13 septembre 2012 du Tribunal était intervenu à propos d’un droit italien antérieur qui était opposé à une marque communautaire.  Ce blog en avait parlé, c’est ici.

La marque communautaire contestée
Le signe italien opposé

Le 27 mars 2014, la Cour de justice annule cet arrêt.

  • Rappelons simplement le passage de l’arrêt du 13 mars 2012 où le tribunal se reporte à l’appréciation par le juge italien de la date d’un cachet postal.

32      En application de la jurisprudence de la Corte suprema di cassazione (Cour de cassation italienne), l’apposition sur un acte sous seing privé d’un cachet postal constitue un fait établissant la date certaine de cet acte au sens de l’article 2704 du code civil, dès lors que le cachet postal figure sur le corps du document lui-même (arrêt du 14 juin 2007, n° 13912). Il ressort également de cette jurisprudence que la preuve contraire de la véracité de la date d’un cachet postal peut être offerte sans qu’il soit besoin d’entamer la procédure d’inscription en faux.

Que dit la Cour le 27 mars 2014. L’arrêt est ici

  • Le droit à un procès équitable constitue un principe fondamental du droit de l’Union, consacré par l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

53      Pour satisfaire aux exigences de ce droit, les juridictions de l’Union doivent veiller à faire respecter devant elles et à respecter elles-mêmes le principe du contradictoire, lequel s’applique à toute procédure susceptible d’aboutir à une décision d’une institution de l’Union affectant de manière sensible les intérêts d’une personne (arrêts du 2 décembre 2009, Commission/Irlande e.a., C‑89/08 P, Rec. p. I‑11245, points 51 et 53, ainsi que du 17 décembre 2009, Réexamen M/EMEA, C‑197/09 RX‑II, Rec. p. I‑12033, point 41 et 42).

54      Le principe du contradictoire ne confère pas seulement à chaque partie à un procès le droit de prendre connaissance des pièces et des observations soumises au juge par la partie adverse et de les discuter. Il implique également le droit pour les parties de prendre connaissance des éléments soulevés d’office par le juge, sur lesquels celui-ci entend fonder sa décision, et de les discuter. Pour satisfaire aux exigences relatives au droit à un procès équitable, il importe en effet que les parties aient connaissance et puissent débattre contradictoirement des éléments tant de fait que de droit qui sont décisifs pour l’issue de la procédure

  • Qui a évoqué l’arrêt de la Cour de cassation italienne ?

55      En l’espèce, il est constant que l’arrêt du 14 juin 2007 n’a été mentionné ni au cours de la procédure devant l’OHMI ni dans les mémoires déposés devant le Tribunal, mais qu’il a été évoqué d’office par ce dernier après la fin de la procédure écrite.

56      Dès lors, il convient d’examiner si, en l’espèce, les parties ont bénéficié ou non, au cours de la procédure devant le Tribunal, de la possibilité de présenter leurs observations au sujet dudit arrêt.

  • Les parties n’ont pas pu présenter leurs observations sur cet arrêt italien

57      Ainsi qu’il ressort des lettres qui leur ont été adressées le 7 février 2012 par le Tribunal et des questions qui y étaient annexées, les parties, si elles ont été invitées à faire valoir leur point de vue sur les dispositions de l’article 2704 du code civil italien, n’ont, en revanche, pas été mises en mesure de présenter leurs observations sur l’arrêt du 14 juin 2007, dont il n’était fait aucune mention dans ces lettres.

58      Par ailleurs, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 117 de ses conclusions, la lecture des points 32, 35, 36, 39 et 40 de l’arrêt attaqué fait clairement ressortir que le contenu de l’arrêt du 14 juin 2007 a joué un rôle déterminant dans le raisonnement du Tribunal. C’est parce qu’il a constaté que la chambre de recours n’avait pas tenu compte de cette jurisprudence, selon laquelle la preuve du défaut de véracité de la date du cachet postal peut être rapportée sans qu’il soit nécessaire de recourir à la procédure d’inscription de faux, que le Tribunal a considéré que la chambre de recours aurait pu accorder davantage d’importance aux anomalies alléguées par la NLC et qu’il convenait, en conséquence, d’annuler la décision litigieuse.

59      Il découle de ce qui précède que le Tribunal a violé le principe du contradictoire résultant des exigences relatives au droit à un procès équitable.

 

 

Demande en concurrence déloyale à propos de la reprise d’une fonction de pliage que présente un sac

Une demande en concurrence déloyale est souvent présentée en complément à une demande en contrefaçon. L’arrêt rendu par la Cour de Paris, le 13 septembre 2013, précise la nature de ce complément d’action. Cette décision est également intéressante par le grief principal de concurrence déloyale : la reprise d’une fonction pliante d’un sac donc la protection pour ce dernier au titre du droit d’auteur est rejetée.

Les extraits cités de l’arrêt se limitent à une partie du débat sur la concurrence déloyale.

Les appelants reprochent aux intimés à titre principal et à titre subsidiaire, tant pour la concurrence déloyale que pour les faits de parasitisme, la reprise de la fonction pliante de la version pliage du sac L…..  et la reprise de l’effet de gamme par la commercialisation des sacs litigieux sous diverses tailles et couleurs ainsi que l’existence d’un risque de confusion compte tenu des ressemblances existant entre les sacs.

  • Une demande en concurrence déloyale  présentée à titre subsidiaire pour la première fois en cause d’appel

Les intimés ne sont pas fondées à soutenir que la société J…. forme une demande nouvelle en cause d’appel et partant irrecevable, au motif que la demande en concurrence déloyale et parasitaire était formée à titre principal, en complément de l’action en contrefaçon en première instance, alors qu’elle est faite, en cause d’appel, en sus, à titre subsidiaire, dès lors qu’il s’agit d’une demande qui tend aux mêmes fins que celles soumises aux premiers juges et repose sur le même fondement juridique.

  • La simple reproduction n’est pas un acte de concurrence déloyale, et la reprise de la fonction pliage n’est pas fautive

Dans un contexte de liberté du commerce et de l’industrie permettant à un acteur économique d’attirer licitement la clientèle de son concurrent, celui qui ne peut opposer valablement un droit de propriété intellectuelle ne peut trouver dans l’action en concurrence déloyale une action de repli afin de faire sanctionner la simple reproduction ou imitation de l »œuvre qu’il commercialise.

A défaut, pour les appelants de démontrer qu’au-delà d’une simple ressemblance exclusive de confusion , les intimés ont adopté un comportement contraire aux usages loyaux du commerce de nature à rompre l’équilibre dans les relations concurrentielles, aucune faute caractérisant la concurrence déloyale ne saurait être retenue ;

……..

La particularité fonctionnelle de pliage qui est ancienne adopté sur les sacs litigieux n’est pas constitutif d’un fait fautif, les appelants ne pouvant prétendre à l’exclusivité de cette fonction.

C’est donc également à bon droit que le tribunal a écarter les demandes formées sur le fondement de la concurrence déloyale et parasitaire.

Aucun fait distinct n’établit le bien-fondé de la même demande formée à titre subsidiaire qui doit être également rejetée.

 

Contentieux entre un dessin et modèle communautaire et une marque communautaire antérieure, tous les deux titres portent sur un signe figuratif avec une différence dans l’expression du visage qui échappe à la compétence de la Cour de Justice

7 novembre 2005 : dépôt à titre de dessin et modèle communautaire :

Pour : «tee-shirts (ornementation pour); casquettes (ornementation pour); autocollants (ornementation pour); imprimés, y compris publicitaires (ornementation pour)»

Le 27 décembre 2005, ce modèle est enregistré par l’OHMI.

18 février 2008 : devant l’OHMI est engagée une demande en nullité du dessin et modèle communautaire d’une part, pour défaut de nouveauté et de caractère individuel et d’autre part, pour atteinte à un droit antérieur par les titulaires de la marque communautaire figurative antérieure :

Enregistrée pour

–        classe 25: «Vêtements, chaussures, chapellerie»;

–        classe 28: «Jeux, jouets; articles de gymnastique et de sport»;

–        classe 32: «Bières; eaux minérales, gazeuses et autres boissons non alcooliques; boissons et jus de fruits, sirops et autres préparations pour faire des boissons».

15 juillet 2008, la division d’annulation de l’OHMI accueille la demande en nullité.

Recours par le titulaire du modèle communautaire

14 octobre 2009 ; la Troisième Chambre de recours de l’OHMI considére « que la division d’annulation a commis une erreur en estimant qu’il était fait usage de la marque antérieure dans le dessin ou modèle contesté. Néanmoins, elle a considéré que ce dernier n’avait pas de caractère individuel, dès lors qu’il ne produisait pas sur l’utilisateur averti, à savoir des jeunes ou des enfants achetant habituellement des tee-shirts, des casquettes et des autocollants ou des utilisateurs d’imprimés, une impression globale différente de celle produite par la marque antérieure ». La Chambre de recours a donc confirmé la nullité du dessin ou modèle contesté, mais sur un autre fondement.

Appel par le titulaire du modèle communautaire

16 décembre 2010 : le Tribunal annule la décision de la Chambre de recours.

20      Il a relevé, aux points 21 et 22 de l’arrêt attaqué, que l’impression globale produite par les deux silhouettes en cause sur l’utilisateur averti est déterminée dans une large mesure par l’expression du visage de chacune de celles-ci. Le Tribunal a souligné que la différence dans l’expression du visage des deux silhouettes constitue une caractéristique fondamentale qui est gardée en mémoire par l’utilisateur averti, tel qu’il a correctement été défini par la chambre de recours.

Pourvoi des titulaires de la marque communautaire

18 octobre 2012 : la Cour de Justice rejette le pourvoi, son pouvoir est en effet très limité.

61      Le Tribunal a ainsi pris en considération l’ensemble du public pertinent tel que défini par la chambre de recours, à savoir les jeunes, les enfants et les utilisateurs d’imprimés, y compris publicitaires. Il en va de même, en ce qui concerne le raisonnement du Tribunal tenu au point 23 de l’arrêt attaqué, dans lequel il s’est référé audit utilisateur averti lors de son examen de l’impression produite par la marque antérieure et le dessin ou modèle contesté. Par la suite, le Tribunal a, au point 24 de l’arrêt attaqué, affirmé, en particulier, que la différence dans l’expression du visage des deux silhouettes apparaîtra clairement aux jeunes et aux enfants.

62      Il s’ensuit qu’il ne saurait être valablement reproché au Tribunal de ne pas avoir fondé son examen des silhouettes sur l’ensemble du public pertinent.

63      En troisième lieu, il convient de relever que MM. Neuman et Galdeano del Sel font, en substance, grief au Tribunal d’avoir considéré que c’est l’expression du visage des deux silhouettes qui détermine l’impression globale de la marque antérieure et du dessin ou modèle contesté sur l’utilisateur averti.

64      À cet égard, force est de constater que, par leur argumentation, MM. Neuman et Galdeano del Sel se bornent, en réalité, à remettre en cause l’analyse de nature factuelle à laquelle s’est livré le Tribunal dans le cadre de l’appréciation de l’impression globale produite par la marque antérieure et le dessin ou modèle contesté et visent ainsi à obtenir de la Cour qu’elle substitue sa propre appréciation à celle du Tribunal.

65      En effet, sans avoir allégué ni démontré que le Tribunal aurait dénaturé les faits qui lui avaient été soumis, MM. Neuman et Galdeano del Sel se sont limités à reprocher au Tribunal d’avoir apprécié à tort les circonstances de l’espèce afin de déterminer que le dessin ou modèle contesté produisait sur l’utilisateur averti une impression globale différente de celle produite par la marque antérieure invoquée à l’appui de la demande en nullité.

66      Or, en vertu d’une jurisprudence constante, le Tribunal est seul compétent, d’une part, pour constater les faits, sauf dans les cas où l’inexactitude matérielle de ses constatations résulterait des pièces du dossier qui lui ont été soumises, et, d’autre part, pour apprécier ces faits. L’appréciation des faits ne constitue donc pas, sous réserve du cas de la dénaturation des éléments qui lui ont étés présentés, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour dans le cadre d’un pourvoi.

67      Il y a donc lieu de rejeter ce grief comme irrecevable.

 

 

Contrefaçon de marque, de dessin et modèle, et de brevet : quelle cour d’appel l’avocat doit-il choisir ?

Un de nos précédents articles avait attiré l’intérêt d’un avis de la Cour de cassation pour déterminer devant quelle cour d’appel présenter l’appel d’un jugement postérieur au 1er novembre 2009, Cet article se rapportait à une affaire de brevet.

Une nouvelle illustration en est donnée avec l’arrêt de la Cour de Montpellier du 27 mars 2012 intervenu cette fois, dans une affaire de marque, à la suite d’un  jugement du 30 avril 2010 du Tribunal de Grande Instance de Rodez.

Le tribunal de grande instance de Rodez, saisi d’une assignation délivrée avant le 1er novembre 2009 demeurait compétent pour statuer, les nouvelles règles d’organisation judiciaire n’étant pas applicables à l’instance en cours devant lui ; tel n’est pas le cas, en revanche, en ce qui concerne l’instance d’appel, introduite par Mmes C, M A, la société Coutellerie Glandières, MM. M et M. M, par déclarations des 22 et 24 juin 2010, postérieurement à l’entrée en vigueur des décrets du 9 octobre 2009.

Si le tableau VI annexé à l’article D. 211-6-1 du code de l’organisation judiciaire désigne le tribunal de grande instance de Marseille pour connaître, en tant que juridiction interrégionale, des actions en matière de marques du ressort des cours d’appel d’Aix-en-Provence, Bastia, Montpellier et Nîmes, la juridiction d’appel de ce tribunal de grande instance spécialisé est nécessairement la cour d’appel d’Aix-en-Provence, conformément au tableau IV annexé à l’article D. 311-1 du code de l’organisation judiciaire ; dès lors que l’action diligentée par Mmes C et les autres demandeurs relève désormais de la compétence du tribunal de grande instance de Marseille, spécialisé dans le contentieux des marques, l’instance d’appel contre le jugement statuant sur une telle action, ne peut être porté que devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence, également spécialisée dans ce type de contentieux.

Surtout cet arrêt souligne l’urgence que la Cour de cassation clarifie cette situation

C’est donc à juste titre que le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevables les appels formées devant la cour d’appel de Montpellier, après avoir retenu que la demande, dont il était saisi, s’analysait, non en une exception d’incompétence, mais en une fin de non-recevoir ; l’ordonnance déférée doit en conséquence être confirmée en toutes ses dispositions.

L’arrêt ayant pris le soin au préalable d’indiquer :

Il résulte de l’article 122 du code de procédure civile que constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir ; l’article 125 du même code énonce d’ailleurs que les fins de non-recevoir doivent être relevées d’office lorsqu’elles ont un caractère d’ordre public, notamment lorsqu’elle résultent de l’inobservation des délais dans lesquels doivent être exercées les voies de recours ou de l’absence d’ouverture d’une voie de recours.

En l’occurrence, le moyen qui tend à soutenir que la cour d’appel de Montpellier n’a pas le pouvoir de statuer sur l’appel d’un jugement rendu en matière de marques, sauf à méconnaître les dispositions d’ordre public de l’article D 211-6-1 du code de l’organisation judiciaire, constitue une fin de non-recevoir et non une exception